Frère
Littérature
[modifier]Critique
[modifier]Giovanni Macchia, Chateaubriand — Europe n°775-776, 1993
[modifier]Vers 1870 deux frères écrivains, liés l'un à l'autre comme une âme en deux corps, abandonnèrent leur appartement parisien pour s'installer à Auteuil, qui était en ce temps-là en lisière de campagne. Neurasthéniques, anémiques, insomniaques, souffrant de gastralgie (leurs maux se déclinaient eux aussi au pluriel), ils s'éloignaient de la capitale pour échapper aux martyre de l'époque moderne : le bruit.
Pour l'un des deux frères, cependant, la vie à Auteuil ne fut marquée par aucune amélioration notable. Entre veille et sommeil, il envisageait d'écrire un roman qui eût le bruit pour objet. Soucieux de trouver une parade, le protagoniste changeait de maison, se réfugiait loin des villes, au cœur des forêts, s'engouffrait jusque dans les tombeaux des pyramides, et parce que nulle part il ne trouvait le silence, il finissait par se tuer ; pourtant, au fond même du sépulcre, la vermine occupée à sa besogne l'empêchait de dormir.
De toute évidence, le bruit (en tant que signe de chaos, de la démence) n'était pas au-dehors mais logeait en lui, d'où il eût été difficile de l'extirper. Ainsi Jules de Goncourt (car tel était son nom), croyant tantôt avoir débarqué sur l'île sonnante de Rabelais, tantôt être au centre de Rome, à l'heure matinale où les cloches de toutes les églises ébranlent de leur clameur la ville endormie, sombrait-il peu à peu dans une maladie incurable, sous le regard douloureux et angoissé de son frère Edmond, qui nous a laissé le journal de son agonie. Et dans l'intervalle entre deux séances de soins, en articulant les mots à la manière des enfants, avec l'obscure conscience que son heure ultime était arrivée, Jules commença à lire, à haute voix, les Mémoires d'outre-tombe de Chateaubriand.
Ce fut la dernière manie de sa vie.
- « L'homme de la mort — Un drame à trois personnages », Giovanni Macchia, Chateaubriand — Revue Littéraire Europe (ISSN 0014-2751), nº 775-776, Novembre-décembre 1993, p. 7
Écrit intime
[modifier]- Rêveries du promeneur solitaire (1782), Jean-Jacques Rousseau, éd. Le Livre de Poche, coll. « Classiques », 2001 (ISBN 978-2-253-160991), Première Promenade, p. 43
Nouvelle
[modifier]Renée Vivien, La Dame à la Louve, 1904
[modifier]Brune comme une Noisette
- La Dame à la Louve, Renée Vivien, éd. Alphonse Lemaire, 1904, Brune comme une Noisette, p. 151
Roman
[modifier]James Joyce, Ulysse, 1922
[modifier]Rochers à l'ananas, citrons confits, caramels mous. Jeune fille enduite de sucre qui verse de pleines pellées de chocolat pour un frère Quatre-bras. Quelque goûter scolaire. Mauvais pour leurs petits bedons. Pâtes et Fruits confits, fournisseur de Sa Majesté le Roi. Dieu. Protège. Le. Assis sur son trône, suçant à blanc de rouges jujubes.
- Ulysse (1922), James Joyce (trad. Auguste Morel), éd. Gallimard, coll. « Folio », 1957 (ISBN 2-07-040018-2), p. 231
Renée Dunan, La Culotte en jersey de soi, 1923
[modifier]- La Culotte en jersey de soi (1923), Renée Dunan, éd. Le Cercle Poche, 2011 (ISBN 978-2-84714-152-8), La Culotte en jersey de soie, p. 38