Charles Baudouin
Charles Baudouin (Nancy, 1893 — Saconnex d'Arve, Genève, 1963), est un psychanalyste « hybride » disciple de Jung tout en restant très attaché à l'héritage freudien.
Introduction
[modifier]- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie Introduction, Maître (1913), p. 16
Idées directrices
[modifier]- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie I. Idées directrices, chap. I. La rampe de lancement : 1900, Pierre Janet, p. 56
L'inconscient freudien, du moins à l'origine, c'est surtout ce que l'individu a refoulé. C'est donc du conscient rejeté, devenu inconscient par une sorte d'accident. Mieux encore, les refoulements essentiels étant ceux de l'enfance, cet inconscient est bien prêt de coïncider avec l'infantile : c'est, pourrait-on dire, l'enfant qui survit secrètement en nous [...].
Freud a fort bien admis ensuite l'existence d'éléments inconscients qui ne procèdent pas du refoulement — qui sont inconscients par nature. Mais c'est bien l'inconscient refoulé qui est au centre de ses recherches, qui a pour lui une signification pratique ; car l'analyse a essentiellement à ses yeux pour fonction de défaire des refoulements, de réparer des accidents.
L'attention de Jung va au contraire se porter avec prédilection sur ces autres éléments qui seraient inconscients par nature, et ainsi la perspective s'élargit singulièrement. Il se plaît à dire que ce serait étriquer fort l'inconscient que de le réduire à des miettes tombées de la table du conscient. Il est plus conforme à ce que nous savons d'admettre que la conscience est une acquisition tardive, et qu'elle a lentement émergé d'un inconscient primordial.
Tandis que l'inconscient refoulé de Freud a un caractère strictement individuel, puisqu'il procède du vécu infantile de chacun, l'inconscient primordial apparaît d'emblée à Jung comme « collectif » dans ses grandes lignes — collectif se définissant essentiellement ici comme : identique chez les divers individus.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie I. Idées directrices, chap. II. Les structures de l'inconscient — L'inconscient collectif, Structures de l'inconscient, p. 73
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie I. Idées directrices, chap. II. Les structures de l'inconscient — L'inconscient collectif, Diverses conceptions de l'inconscient collectif, p. 79
[...] si l'état psychotique est celui où le moi conscient est submergé par l'inconscient collectif, cet accident sera d'autant plus à redouter que le moi est plus faible. Plus exactement, il s'agit d'un rapport de forces — comme celui de la vague et de la digue ; ce qui permet à Jung de suggérer une discrimination encore, qui pourrait être grosse de conséquences, entre deux sortes de schizophrénies : l'une où il faut incriminer la faiblesse du moi, l'autre qui procéderait d'une force exeptionnelle de l'inconscient.
[...] Il est des cas sévères, où il importe surtout de « fortifier le moi » [...]. Ce à quoi du moins il nous avertit de prendre garde, c'est à un moi apparemment fort parce qu'il est concentré, excessivement rationnel, obstiné ; cette raideur doit être suspecte ; elle risque de dissimuler en réalité un moi faible qui se tient par là sur la défensive ; c'est alors qu'on parle, trop facilement peut-être, de psychose latente ; mais c'est alors du moins qu'une effraction brusque des forces inconscientes peut déterminer bel et bien l'éclatement d'une psychose.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie I. Idées directrices, chap. II. Les structures de l'inconscient — L'inconscient collectif, Application à la psychiatre, p. 90
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie I. Idées directrices, chap. IV. Prométhé et Epiméthée, Psychologie et poésie, p. 135
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie I. Idées directrices, chap. IV. Prométhé et Epiméthée, Psychologie et poésie, p. 136
Discrimination
[modifier]- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie II. Discriminations, chap. V. Les types et les fonctions, Fonctions et refoulement, p. 154
La théorie de Freud rattache les troubles nerveux à certains chocs, à certains traumatismes, c'est-à-dire à des cicatrices affectives, dont les principales se situeraient dans l'enfance. Cependant, Freud lui-même, pour rendre compte de l'action à retardement de ces chocs (puisque la maladie éclate en général longtemps après, au cours de l'âge adulte), a fait appel à une autre notion, celle de régression. A la suite d'accidents ultérieurs, la « libido », l'énergie affective de l'être, reflue ; refluant, elle rencontre les traces des chocs anciens, qui constituent pour elle des lieux de stagnation privilégiés ; c'est ainsi que ces traces se trouvent ravivées (qu'une peur d'enfance ressuscite en phobie ou en angoisse), et que la névrose éclate.
Au shéma de cette thèse, Jung ne prétend rien changer d'essentiel, mais il place l'accent autrement. Il est clair que l'attention de Freud est retenue avant tout par le traumatisme ; Jung considère la régression, et se demande en outre quel est l' accident dont elle procède. Il observe alors que cet accident est un conflit actuel.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie II. Discriminations, chap. VII. Les âges de la vie, Débat de l'infantile et de l'actuel, p. 192
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie II. Discriminations, chap. VII. Les âges de la vie, Débat de l'infantile et de l'actuel, p. 193
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie II. Discriminations, chap. VIII. « L'énergétique de l'âme » : les pôles opposés, Le complexe au point de vue énergétique, p. 211
[ Jung ] ne pense pas qu'il soit légitime, ni même possible, de réduire [la libido], comme le voulait Freud, à l'énergie du seul instinct sexuel. Ici, comme sur d'autres points, c'est son expérience des psychoses qui paraît avoir alerté Jung et l'avoir conduit à prendre ses distances par rapport à Freud. Cette divergence s'exprime dès 1912, dans l'ouvrage capital Métamorphoses et symboles de la libido. Voici, à cet égard, une page particulièrement significative :
« Jadis, dans ma Psychologie de la démence précoce, je me suis tiré d'affaire en employant l'expression énergie psychique parce que ce qui disparaît est plus que le simple intérêt érotique.
Il manque une telle masse de fonction du réel que la perte doit englober des fonctions instinctives auxquelles on ne peut attribuer aucun caractère sexuel, car personne n'admettra que la réalité ne soit qu'une fonction sexuelle. »
C'est en dégageant le postulat énergétique qui y était implicitement contenu, que Jung arrive à considérer la libido comme l'énergie de tout instinct.
- Carl Gustav Jung in L'Énergétique psychique, 1956.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie II. Discriminations, chap. VIII. « L'énergétique de l'âme » : les pôles opposés, La libido et ses avatars, p. 213
Jung s'est convaincu, en fréquentant Alfred Adler, que différents instincts, et non pas le seul instinct sexuel, sont représentés dans chaque complexe. Si donc on regarde les complexes comme les relais entre l'instinct et l'esprit, il faut admettre qu'à ces relais, les forces instinctives se brassent, se disjoignent, s'enchevêtrent et se regroupent autrement, de telle sorte que les manifestations supérieures dérivées des complexes ne peuvent être nourries par un seul instinct, quel qu'il soit [...].
Jung élargit donc la libido au sens d'énergie psychologique, non sans se souvenir que cette énergie est, à l'origine, celle des instincts en général.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie II. Discriminations, chap. VIII. « L'énergétique de l'âme » : les pôles opposés, La libido et ses avatars, p. 214
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie II. Discriminations, chap. VIII. « L'énergétique de l'âme » : les pôles opposés, Mobilisation de l'énergie, p. 216
Sur ce problème de la mobilisation de l'énergie, Jung nous présente des vues fort neuves et précieuses.
Elles procèdent notamment de sa connaissance des primitifs. Car la volonté est une acquisition tardive de la civilisation. A sa place, que trouvons-nous chez les primitifs ? La réponse est inattendue et d'autant plus éclairante : nous trouvons des rituels ; ce sont eux qui ont pour fonction de mobiliser l'énergie.
« La complication souvent énorme des cérémonies de ce genre montre ce qui est nécessaire pour détourner la libido de son cours naturel, l'habitude quotidienne, et la pousser à une activité inhabituelle. »
- Carl Gustav Jung in L'Énergétique psychique, 1956.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie II. Discriminations, chap. VIII. « L'énergétique de l'âme » : les pôles opposés, Mobilisation de l'énergie, p. 216
Réalité de l'âme
[modifier]- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. IX. Les archétypes, p. 233
- Jolande Jacobi in Complexe, archétype, symbole, 1961.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. IX. Les archétypes, L'archétype et ses définitions, p. 242
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. IX. Les archétypes, Une notion complexe, p. 245
L' anima, comme tout archétype, entraîne avec elle une frange de mythe et de primitivité ; elle est prise dans des implications intimes, infantiles, sexuelles, qui font d'elle une notion psychanalytique au sens strict ; l'on peut dire à cet égard qu'elle a partie liée, d'une part, avec une image de la mère, d'autre part avec une idée ou un idéal de la femme, tels que chaque homme peut les concevoir.
[...] reconnaissant ensuite que l' anima, ainsi comprise et ainsi sexuée, est essentiellement une pièce de psychologie masculine, Jung éprouva le besoin de la doubler de son pendant en psychologie féminine, désignant celui-ci du terme d' animus.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. IX. Les archétypes, Exemples d'archétypes : anima, animus, p. 246
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. IX. Les archétypes, Exemples d'archétypes : anima, animus, p. 247
[...] anima et animus, pour autant qu'ils plongent dans l'infantile et le primitif, qu'ils sont insuffisamment intégrés par le moi, infligent à celui-ci des perturbations qui ne sont pas identiques selon qu'elles proviennent de l'une ou de l'autre de ces « deux figures » :
« Un homme sous l'influence de l' anima est sujet à des humeurs inconsidérées, et une femme possédée par son animus voudra toujours avoir raison et émettra des opinions malencontreuses qui n'ont qu'une apparence de légitimité. »
Humeurs, en bref, qui auront tout le caractère de réactions d'une sentimentalité intempestive, enfantine, déconcertante ; opinions qui se présenteront comme un ergotage désagréable et grinçant.
- Carl Gustav Jung in Psychologie et religion, 1958.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. IX. Les archétypes, Exemples d'archétypes : anima, animus, p. 247
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. X. Compréhension de la mythologie, Le mythe du héros, p. 264
Dans une exploration allant du dehors au-dedans, c'est naturellement la persona, cette façade sociale, que nous rencontrons d'abord [...].
« Chez un sujet aussi bien adapté au monde extérieur qu'à son monde intérieur, la persona est en quelque sorte une façade protectrice nécessaire, mais élastique, lui assurant un contact relativement naturel, régulier et aisé avec le monde extérieur. Mais elle peut aussi devenir un danger, précisément à cause de la fatalité avec laquelle elle permet à l'homme de dissimuler sa véritable nature derrière cette forme d'adaptation, devenue si coutumière. Alors elle se raidit, devient mécanique et se transforme en un véritable masque, sous lequel l'individu dépérit et finira par étouffer complètement. »
- Jolande Jacobi, La Psychologie de C.G.Jung, 1950.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », La persona, p. 275
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Le moi, p. 278
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Le moi, p. 278
- Carl Gustav Jung in Types psychologiques, 1950.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Le moi, p. 280
- Carl Gustav Jung in L'Homme à la découverte de son âme, 1950.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Le moi, p. 281
- Carl Gustav Jung in L'Homme à la découverte de son âme, 1950.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Résolution de certaines ambiguïtés, p. 283
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Résolution de certaines ambiguïtés, p. 284
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », L'ombre, p. 284
[L'ombre est] l'un des archétypes les plus accessibles à l'investigation — plus accessible que l' anima ou l' animus, qui, dans la règle, ne se manifestent qu'ensuite, et l'ombre une fois élucidée. Car [...] il y a un ordre dans cette investigation des « profondeurs » ; il y a des positions relatives, des distances, une topographie dans cette exploration que Jung a pris l'habitude de nommer le processus d'individuation, et qui conduit l'homme, à partir de sa persona qui n'est qu'un paraître, et de son moi qui n'est encore qu'une vue de son être, vers son être véritable. L'ombre serait [...] la première étape vers les profondeurs de l'inconscient. Elle se tient au seuil :
« Elle nous barre, avec la masse sombre du matériel d'expérience qui n'a jamais pu venir à la vie, la route des profondeurs créatrices de notre inconscient. »
- Jolande Jacobi, La Psychologie de C.G.Jung, 1950.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », L'ombre, p. 285
L' anima et l' animus plongent plus avant dans l'inconscient, dont on a pu dire qu'ils sont la représentation même ; c'est si vrai que l'accès à ces figures n'est, dans la règle, possible qu'après l'exploration de l'ombre, comme si celle-ci obstruait le passage vers elles [...]. Mais la difficulté procède encore et peut-être surtout du caractère de ces images : il est dans leur nature d'être projetées sur des êtres du monde extérieur ; aussi n'est-ce guère par l'examen intérieur que nous saurons les découvrir d'abord ; nous les appréhendons plutôt à travers « le retrait de la projection ».
[...] la projection la plus courante de ces figures est celle qui a lieu dans l'exaltation amoureuse. Tout le halo d'illusion qui illumine alors un « objet » parfois trop évidemment médiocre procède de cette source.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Anima et animus, p. 290
- Jolande Jacobi, La Psychologie de C.G.Jung, 1950.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Anima et animus, p. 291
Il y a lieu de se garder, dit [ Jung ], d'une confusion entre « prendre conscience » [...] et « devenir soi-même » [...]. En vertu de cette confusion « le moi tend à s'identifier au soi », ce qui n'aboutit qu'à un pur « égocentrisme ou auto-centrisme ».
Le soi vivant est autre chose :
« Le soi comprend en lui infiniment plus qu'un moi seulement, ainsi que la symbolique le démontre depuis les temps les plus anciens. Le soi, c'est l'autre ou les autres, et non pas seulement le moi. L'individuation n'exclut pas le monde, mais l'inclut. »
- Carl Gustav Jung in Von den Wurzeln des Bewussteins, 1954.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XI. Le moi et ses « partenaires » : le « processus d'individuation », Le terme du processus : le soi, p. 298
« [...] pourquoi incitai-je mes malades, à un certain stade de leur développement, à s'exprimer par le pinceau, le crayon ou la plume ? Avant tout, pour déclencher en eux une action. »
Non content de parler ses images, le sujet désormais «les inscrit dans un acte du moi. »
« Ainsi, le pur phantasme se marie à un élément de réalité. C'est là une acquisition de valeur inestimable, c'est un germe d'indépendance, une transition vers la maturité psychologique. »
Dans les lignes qui suivent celles-ci, Jung précise tout le sens qu'il attache à ce terme : « maturité psychologique ». Il ne s'agit pour lui de rien de moins que du « processus d'individuation », du passage du moi au soi.
- Carl Gustav Jung in La Guérison psychologique, 1953.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie III. « Réalité de l'âme », chap. XII. Originalité thérapeutique, Dessins et peintures, p. 314
Prolongements et dépassements
[modifier]- Carl Gustav Jung in L'Homme à la découverte de son âme, 1950.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie IV. Prolongements et dépassements, chap. XV. Perspectives philosophiques : Psychologie et religion, Philosophie, santé, sagesse, p. 398
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie IV. Prolongements et dépassements, chap. XV. Perspectives philosophiques : Psychologie et religion, Humanisme et personnalisme, p. 401
Conclusion
[modifier]Nous disions un jour familièrement que le psychisme apparaissait alors un peu comme « une boule de pulsions » et cet écheveau, ou ce hérisson, résistait à la prise d'un intellect épris d'ordonnance. A l'époque dont nous parlons, il apparut à Freud qu'il devenait possible [...] de structurer davantage cette masse, de voir s'y dessiner des lignes maîtresses, de distinguer en elle des groupements de forces aux directions définies, des synergies, une hiérarchie peut-être, qui permettrait d'organiser ce donné. Ainsi apparurent les instances.
[...] c'est au même besoin de structurer une materia prima, d'y pratiquer des discriminations, que répond chez [ Jung ] l'introduction de notions telles que la persona, l' anima, le soi — que nous conviendrons d'appeler les instances jungiennes.
- L'Œuvre de Jung et la psychologie complexe (1963), Charles Baudouin, éd. Payot & Rivages, coll. « Petite Bibliothèque Payot », 2002 (ISBN 2-228-89570-9), partie Conclusion : Freud, Junget la psychologie des instances, Le tournant des années 1920 et l'introduction des « instances », p. 466