Centaure
Dans la mythologie grecque, un centaure (en grec ancien Κένταυρος / Kéntauros) est une créature mi-homme, mi-cheval (homme-cheval), que l'on disait issue soit d'Ixion et de Néphélé, soit de Centauros et des juments de Magnésie.
Arts antiques
[modifier]Homère, Iliade, VIIIe siècle avant J.-C.
[modifier]- (grc)
κάρτιστοι δὴ κεῖνοι ἐπιχθονίων τράφεν ἀνδρῶν:
κάρτιστοι μὲν ἔσαν καὶ καρτίστοις ἐμάχοντο
φηρσὶν ὀρεσκῴοισι καὶ ἐκπάγλως ἀπόλεσσαν.
- Nestor, au sujet de Pirithoos, Dryas et Thésée. Les "Monstres de la montagne" sont les Centaures.
- L'Iliade, Homère (trad. Paul Mazon), éd. Les Belles Lettres, coll. « Classiques en poche », 1937-38 (traduction), 1998 (édition), chant I, vers 266-268, p. 23 (texte intégral sur Wikisource)
- (grc)
ἀλλ᾽ ἐμὲ μὲν σὺ σάωσον ἄγων ἐπὶ νῆα μέλαιναν,
μηροῦ δ᾽ ἔκταμ᾽ ὀϊστόν, ἀπ᾽ αὐτοῦ δ᾽ αἷμα κελαινὸν
νίζ᾽ ὕδατι λιαρῷ, ἐπὶ δ᾽ ἤπια φάρμακα πάσσε
ἐσθλά, τά σε προτί φασιν Ἀχιλλῆος δεδιδάχθαι,
ὃν Χείρων ἐδίδαξε δικαιότατος Κενταύρων.
- Eurypyle blessé, à Patrocle.
- L'Iliade, Homère (trad. Paul Mazon), éd. Les Belles Lettres, coll. « Classiques en poche », 1937-38 (traduction), 1998 (édition), chant XI, vers 828-832, p. 157 (texte intégral sur Wikisource)
Homère, Odyssée, VIIIe siècle avant J.-C.
[modifier]Le vin de miel te trouble l'esprit, qui altère
quiconque en boit la bouche ouverte, sans mesure.
C'est lui aussi qui égara l'illustre Eurytios,
le Centaure, au palais du généreux Pirithoüs,
venu chez les Lapithes. Le vin égarant ses entrailles,
en proie à la démence, il fauta chez Pirithoüs.
La fureur saisit ces héros, ils bondirent sur lui,
le traînèrent dehors, lui moissonnant d'un coup d'épée
le nez et les oreilles ; lui, égaré dans ses entrailles,
partit portant la faute de son âme enténébrée.
De là naquit la guerre des Centaures avec les hommes,
où cet ivrogne, le premier, trouva la mort.
Je te prédis pareil malheur, si tu tends l'arc.
- (grc)
οἶνός σε τρώει μελιηδής, ὅς τε καὶ ἄλλους
βλάπτει, ὃς ἄν μιν χανδὸν ἕλῃ μηδ᾽ αἴσιμα πίνῃ.
οἶνος καὶ Κένταυρον, ἀγακλυτὸν Εὐρυτίωνα,
ἄασ᾽ ἐνὶ μεγάρῳ μεγαθύμου Πειριθόοιο,
ἐς Λαπίθας ἐλθόνθ᾽: ὁ δ᾽ ἐπεὶ φρένας ἄασεν οἴνῳ,
μαινόμενος κάκ᾽ ἔρεξε δόμον κάτα Πειριθόοιο:
ἥρωας δ᾽ ἄχος εἷλε, διὲκ προθύρου δὲ θύραζε
ἕλκον ἀναΐξαντες, ἀπ᾽ οὔατα νηλέϊ χαλκῷ
ῥῖνάς τ᾽ ἀμήσαντες: ὁ δὲ φρεσὶν ᾗσιν ἀασθεὶς
ἤϊεν ἣν ἄτην ὀχέων ἀεσίφρονι θυμῷ.
ἐξ οὗ Κενταύροισι καὶ ἀνδράσι νεῖκος ἐτύχθη,
οἷ δ᾽ αὐτῷ πρώτῳ κακὸν εὕρετο οἰνοβαρείων.
ὣς καὶ σοὶ μέγα πῆμα πιφαύσκομαι, αἴ κε τὸ τόξον
ἐντανύσῃς:
- Antinous à Ulysse
- L'Odyssée, Homère (trad. Philippe Jaccottet), éd. La Découverte/Syros, coll. « La Découverte Poche », 2004 (première parution de cette traduction : 1955), chant XXI, 293-307, p. 346 (texte intégral sur Wikisource)
Pindare, Pythiques, VIe siècle avant J.-C.
[modifier]elle le nomma, l'ayant élevé, Centaure ; lequel
aux juments de Magnésie se mêla au pied
du Pâlion, en naquit une troupe
merveilleuse, semblable aux deux
parents, à leur mère pour le bas, pour le haut à leur père.
- (grc)
τὸν ὀνύμαξε τράφοισα Κένταυρον, ὃς
45ἵπποισι Μαγνητίδεσσι ἐμίγνυτ᾽ ἐν Παλίου
σφυροῖς, ἐκ δ᾽ ἐγένοντο στρατὸς
θαυμαστός, ἀμφοτέροις
ὁμοῖοι τοκεῦσι, τὰ ματρόθεν μὲν κάτω, τὰ δ᾽ ὕπερθε πατρός.
- Ixion et la Nuée engendrent un fils, Kentauros (Centaure), qui à son tour engendre les Centaures. Le Pâlion est le mont Pélion, en Thessalie.
- (grc) Œuvres complètes (VIe siècle avant J.-C.), Pindare (trad. Jean-Paul Savignac), éd. La Différence, coll. « Minos », 2004, partie Pythiques, II, p. 175, vers 44-48
Apollonios de Rhodes, Argonautiques, IIIe siècle avant J.-C.
[modifier]- (grc) Καινέα γὰρ ζῶόν περ ἔτι κλείουσιν ἀοιδοὶ 60Κενταύροισιν ὀλέσθαι, ὅτε σφέας οἶος ἀπ᾽ ἄλλων ἤλασ᾽ ἀριστήων: οἱ δ᾽ ἔμπαλιν ὁρμηθέντες οὔτε μιν ἐγκλῖναι προτέρω σθένον, οὔτε δαΐξαι: ἀλλ᾽ ἄρρηκτος ἄκαμπτος ἐδύσετο νειόθι γαίης, θεινόμενος στιβαρῇσι καταΐγδην ἐλάτῃσιν.
- (grc) Argonautiques (IIIe siècle avant J.-C.), Apollonios de Rhodes (trad. Émile Delage), éd. Les Belles Lettres, coll. « Collection des universités de France », 1974, partie I, p. 53, vers 59-64
Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, Ier siècle avant J.-C.
[modifier]- (grc) καθόλου μὲν γὰρ ἐν ταῖς μυθολογουμέναις ἱστορίαις οὐκ ἐκ παντὸς τρόπου πικρῶς τὴν ἀλήθειαν ἐξεταστέον. καὶ γὰρ ἐν τοῖς θεάτροις, πεπεισμένοι μήτε Κενταύρους διφυεῖς ἐξ ἑτερογενῶν σωμάτων ὑπάρξαι μήτε Γηρυόνην τρισώματον, ὅμως προσδεχόμεθα τὰς τοιαύτας μυθολογίας, καὶ ταῖς ἐπισημασίαις συναύξομεν τὴν τοῦ θεοῦ τιμήν.
- (grc) Bibliothèque historique (Ier siècle avant J.-C.), Diodore de Sicile (trad. Anahita Bianquis), éd. Les Belles Lettres, coll. « La Roue à livres », 1997, partie IV, chap. 8, 4, p. 25
Ovide, Métamorphoses, Ier siècle apr. J.-C.
[modifier]Époux d'Hippodamé, le fils du fier Ixion
À sa noce invita ses frères les Centaures.
- (la)
- Noces d'Hippodamie et de Pirithoüs (fils d'Ixion), au cours de laquelle a lieu le combat entre les Lapithes et les Centaures.
- (la) Les Métamorphoses, Ovide (trad. Olivier Sers), éd. Les Belles Lettres, coll. « Classiques en poche », 2009, XII, p. 559, vers 210-211
Virgile, Énéide, Ier siècle avant J.-C.
[modifier]- (la)
Multaque praeterea variarum monstra ferarum:
Centauri in foribus stabulant, Scyllaeque biformes,
et centumgeminus Briareus, ac belua Lernae
horrendum stridens, flammisque armata Chimaera,
Gorgones Harpyiaeque et forma tricorporis umbrae.
- Fantômes de plusieurs monstres de la mythologie errant dans les Enfers.
- (la)
ceu duo nubigenae cum vertice montis ab alto
descendunt centauri, Homolen Othrymque nivalem
linquentes cursu rapido; dat euntibus ingens
silva locum et magno cedunt virgulta fragore.
- Comparaison homérique au sujet des frères Catillus et Coras, deux guerriers de l'armée de Turnus.
Philostrate de Lemnos, La Galerie de tableaux, IIe siècle après J.-C.
[modifier]- (grc) (...) καὶ τὰ ἄντρα κάλλιστα καὶ αἱ πηγαί, καὶ αἱ παρ᾽ αὐτοῖς κενταυρίδες, εἰ μὲν ἐπιλαθοίμεθα τῶν ἵππων, οἷον Ναίδες, εἰ δὲ μετὰ τῶν ἵππων αὐτὰς λογιζοίμεθα, οἷον Ἀμαζόνες, ἡ γὰρ τοῦ γυναικείου εἴδους ἁβρότης ῥώννυται συνορωμένου αὐτῷ τοῦ ἵππου.
- (grc) La Galerie de tableaux (IIe siècle après J.-C.), Philostrate de Lemnos (trad. Auguste Bougot, traduction révisée par François Lissarrague), éd. Les Belles Lettres, coll. « La Roue à livres », 1991, partie II, chap. 3. Les Centauresses, p. 68
Évocations au Moyen âge
[modifier]Littérature
[modifier]Dante, La Divine Comédie
[modifier]- (it)
e tra ’l piè de la ripa ed essa, in traccia
corrien centauri, armati di saette,
come solíen nel mondo andare a caccia.
- (it) La Divine Comédie, Dante Alighieri (trad. Alexis-François Artaud de Montor.), éd. Garnier Frères, sans date (1870), partie I. L'Enfer, chap. 12, p. 44, vers 55-57 (texte intégral sur Wikisource)
Évocations modernes
[modifier]Politique
[modifier]Nicolas Machiavel, Le Prince, 1532
[modifier]- (it) Dovete adunque sapere come sono due generazioni di combattere: l’una con le leggi, l’altra con le forze. Quel primo è degli uomini; quel secondo è delle bestie; ma perchè il primo spesse volte non basta, bisogna ricorrere al secondo. Pertanto ad un Principe è necessario saper ben usare la bestia e l’uomo. Questa parte è stata insegnata a’ Principi copertamente dagli antichi scrittori, i quali scrivono come Achille e molti altri di quelli Principi antichi furono dati a nutrire a Chirone Centauro, che sotto la sua disciplina gli custodisse; il che non vuol dire altro l’avere per precettore un mezzo bestia e mezzo uomo, se non che bisogna a un Principe sapere usare l’una e l’altra natura, e l’una senza l’altra non è durabile.
- (it) Titre du livre, Nicolas Machiavel (trad. Jean Vincent Périès), éd. Charpentier, 1855, chap. XVIII. Comment les princes doivent tenir leur parole, p. 74 (texte intégral sur Wikisource)
Littérature
[modifier]Pierre de Ronsard, Les Amours, 1553
[modifier]En cent façons, desjà, desjà ma langue
Avant-pensoit les mots de sa harangue,
Jà soulageant de mes peines le fais,
Quand un Centaure envieus sur ma vie
L'aiant en crope au galop l'a ravie,
Me laissant seul, et mes cris imparfaits.
- La femme à qui Ronsard se préparait à déclarer son amour est enlevée par un Centaure.
- Les amours de P. de Ronsard Vandomois, nouvellement augmentées par lui, & commentées par Marc Antoine de Muret. Plus quelques odes de l'auteur, non encor imprimées (1553), Pierre de Ronsard, éd. chez la veuve Maurice de la Porte, 1553, 177. Au cœur d'un val, emaillé tout au rond, p. 207 (texte intégral sur Wikisource)
Évocations contemporaines
[modifier]Littérature
[modifier]Maurice de Guérin, Le Centaure, 1840
[modifier]- « Le Centaure », George de Guérin, La Revue des deux mondes, vol. 22 1840, p. 585 (texte intégral sur Wikisource)
José-Maria de Heredia, Les Trophées, 1893
[modifier]Du temps que je vivais à mes frères pareil
Et comme eux ignorant d'un sort meilleur ou pire,
Les monts Thessaliens étaient mon vague empire
Et leurs torrents glacés lavaient mon poil vermeil.
- Les Trophées (1893), José-Maria de Heredia, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1981, chap. Nessos (v.1-4), La Grèce et la Sicile, p. 35
C'est que leur amour même aux brutes nous ravale ;
Le cri qu'il nous arrache est un hennissement,
Et leur désir en nous n'étreint que la cavale.
- Une Centauresse à propos des Centaures.
- Les Trophées (1893), José-Maria de Heredia, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1981, chap. La Centauresse (vers 13-14), La Grèce et la Sicile, p. 36
La foule nuptiale au festin s'est ruée,
Centaures et guerriers ivres, hardis et beaux ;
Et la chair héroïque, au reflet des flambeaux,
Se mêle au poil ardent des fils de la Nuée.
- Les Trophées (1893), José-Maria de Heredia, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1981, chap. Centaures et Lapithes (v. 1-4), La Grèce et la Sicile, p. 37
Henri de Régnier, La Cité des eaux, 1902
[modifier]Ardent de ta vitesse et cabré de ta course,
Tu dressais, sur le ciel derrière toi sanglant,
Homme et cheval, le double effort de ton élan
Où le poitrail de bête et la poitrine humaine
Respiraient d’un seul souffle et d’une seule haleine.
- Le Centaure blessé, Henri de Régnier, éd. Mercure de France, 1902, Inscriptions lues au soir tombant, p. 177 (texte intégral sur Wikisource)
André Lichtenberger, Les Centaures, 1904
[modifier]- Les Centaures (1904), André Lichtenberger, éd. Callidor, coll. « Âge d'or », 2017, Première partie, p. 28 (texte intégral sur Wikisource)
Max Jacob, Le Cornet à dés, 1946
[modifier]Oui! j'ai rencontré le Centaure! c'était sur une route de Bretagne : les arbres ronds étaient disséminés sur les talus. Il est couleur café au lait; il a les yeux concupiscents et sa croupe est plutôt la queue d'un serpent que le corps d'un cheval. J'étais trop défaillant pour lui parler et ma famille nous regardait de loin, plus effrayée que moi. Soleil! que de mystères tu éclaires autour de toi.
- (fr) Le Cornet à dés, Max Jacob, éd. Gallimard, coll. « Poésie », 1967, Seconde partie, p. 160
Salim Barakat, Les Grottes de Haydrahodahus, 2004
[modifier]- (fr) Les Grottes de Haydrahodahus (2004), Salim Barakat (trad. Bayan Sahman en collaboration avec Christine Montalbetti), éd. Actes Sud, 2008, p. 9