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Écrivain

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Un écrivain public, de Hortense Haudebourt-Lescot
Un écrivain public, de Hortense Haudebourt-Lescot

Un écrivain compose des écrits de création, d'information ou d'éducation qui sont quelquefois publiés par une maison d’édition.

En réalité, l'art de l'écrivain consiste surtout à nous faire oublier qu'il emploie des mots. L'harmonie qu'il cherche est une certaine correspondance entre les allées et les venues de son esprit et celles de son discours, correspondance si parfaite que, portées par la phrase, les ondulations de sa pensée se communiquent à la nôtre et qu'alors chacun des mots, pris individuellement, ne comptent plus : il n'y a plus rien que le sens mouvant qui traverse les mots, plus rien que deux esprits qui semblent vibrer directement, sans intermédiaire, à l'unisson l'un de l'autre.


Je ne suis pas un écrivain. La seule vue d'une feuille de papier blanc me harasse l'âme. L'espèce de recueillement physique que m'impose un tel travail m'est si odieux que je l'évite autant que je puis.
  • Les Grands Cimetières sous la lune, dans Essais et écrits de combat, I, Georges Bernanos, éd. Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1971, p. 353-354


L'écrivain, c'est celui qui ne gagne aucune place — pas même la dernière. Celui qui se tient comme ça, debout, dans un rang de chaises vides. À nommer le feu d'une voix glacée.


Écrire c'est faire retentir sur la neige chaque pas de l'ange. Écrire c'est par instants se retourner, et voir l'éclair de la hache haut levée, d'un seul coup la fin de l'énigme.


Roberto Bolaño

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Les écrivains actuels ne sont plus (…) de petits messieurs prêts à foudroyer la respectabilité sociale et encore moins une poignée d'inadaptés mais des individus issus de la classe moyenne et du prolétariat prêts à escalader l'Everest de la respectabilité, avides de respectabilité. Ce sont les blonds et bruns fils du peuple de Madrid, ce sont des individus qui viennent du bas de la classe moyenne et qui espèrent finir leurs jours dans la partie supérieure de cette même classe. Ils ne refusent pas la respectabilité. Ils la recherchent désespérément. Pour l'atteindre il leur faut beaucoup suer. Signer des livres, sourire, se retrouver dans des coins inconnus, sourire, faire le pitre dans les émissions people, sourire beaucoup, surtout ne pas mordre la main qui leur donne à manger, assister à des foires du livre et répondre avec bonne volonté aux questions les plus crétines, sourire dans les pires situations, prendre l'air intelligent, (…) dire toujours merci.
  • Il s’agit des écrivains actuels d’Amérique latine que l’auteur oppose à ceux de la génération précédente, plus engagés
  • Le Gaucho insupportable, Roberto Bolaño (trad. Robert Amutio), éd. Christian Bourgois, 2008  (ISBN 9 782267 019766), partie Les Mythes de Cthulhu, p. 183


Jean de Bonnefon

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J'ai écrit, au début de ma vie, parce que la profession des lettres m'a semblé être la plus libérale et la plus indépendante du monde.
J'ai continué, sans cesser, le dur et cher métier parce que l'indépendance est un objet de perpétuel combat. J'ai continué parce que la bonté des lecteurs donne courage et force.
Puis… dans l'écriture « le travail est un but non un moyen ».

  • « Notre enquête — Pourquoi écrivez-vous ? », Jean de Bonnefon, Littérature, nº 11, Décembre 1920, p. 22


Ray Bradbury

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Les bons écrivains touchent souvent la vie du doigt. Les médiocres ne font que l’effleurer. Les mauvais la violent et l’abandonnent aux mouches.


La noblesse du métier d'écrivain est dans la résistance à l'oppression, donc au consentement à la solitude.
  • Dans Annexes.


Pourquoi me rendis-je écrivain ? parce que j'avais quelque chose à dire et que, de plus, j'étais sujet au désespoir, mon métier m'empêcha de me détruire volontairement, au moins jusqu'à cette heure, cela m'arrivera pourtant, la gloire ne m'étant venue, la gloire eût traversé ma volonté de mort.


Il n’y a pas cinquante kilomètres carrés de notre pays qui n’aient vu naître un écrivain. C’est trop. Il ne reste plus de place pour les lecteurs.
  • Dictionnaire égoïste de la littérature française, Charles Dantzig, éd. Grasset, 2005, p. 315


Chacun a son écrivain protégé, maigrelette plante verte à laquelle la bourrasque des temps n'a laissé qu'une feuille et qu'il entretient avec affection, le couvrant de son petit engrais d'amour.
  • Dictionnaire égoïste de la littérature française, Charles Dantzig, éd. Grasset, 2005, p. 631


Maxime du Camp

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On ne saurait avoir trop d’indulgence pour l’écrivain pauvre ; car souvent les nécessités de l’existence l’entraînent à modifier sa pensée ; en revanche, l’écrivain qui est « à son aise » et qui manque à sa conscience est inexcusable.
  • Souvenirs d'un demi-siècle, Maxime du Camp, éd. Hachette, 1949, p. 10


Né au milieu des manuscrits de mon père, dans une maison où les succès du romancier et de l'auteur dramatique apportaient l'aisance, avec le va-et-vient continuel des journalistes, des artistes, des éditeurs et des directeurs, il m'eût été bien difficile de rêver une carrière autre.
Écrire m'est un plaisir.
À côté de l'existence commune l'homme de lettres s'extériorise par imagination, des deux vies la seconde est préférable à la première.
Le rêve surpasse la réalité.

  • « Notre enquête — Pourquoi écrivez-vous ? », Paul Féval, Littérature, nº 10, Décembre 1919, p. 22


Il nous faut donc un auteur (si vous n'en avez pas vous en trouverez), sinistre, disais-je (ils le sont naturellement), quelque peu pédant, j'y tiens (par souci de vraisemblance), mais de bonne compagnie.
  • La Décomposition, Anne F. Garréta, éd. Grasset (Le Livre de Poche), 1999, p. 143


Vous pourrez classer les écrivains selon que leur réponse à votre enquête commencera par « afin de », « pour » ou par « parce que ».
Il y aura ceux pour qui la littérature est surtout un but, et ceux pour qui surtout un moyen.
Quant à moi, j'écris parce que j'ai une bonne plume, et pour être lu par vous…

  • « Notre enquête — Pourquoi écrivez-vous ? », André Gide, Littérature, nº 10, Décembre 1919, p. 24


Écrivain : quelqu’un qui croit sentir que quelque chose, par moments, demande à acquérir par son entremise le genre d’existence que donne le langage. Genre d’existence dont le public est le vérificateur capricieux, intermittent, et peu sûr, et l’auteur le seul garant fiable. Le public est un réseau qu’on peut toujours court-circuiter sans que rien d’essentiel au phénomène littéraire s’annule : le voyant témoin qui s’allume dans la cervelle de l’auteur est nécessaire et suffisant. Le courant qui passe au fil de la plume ne va vers personne ; il faudrait en finir une bonne fois avec l’image égarante des " chers lecteurs " levés à l’horizon de l’écritoire et de l’écrivain, ainsi qu’à celui d’un orateur public la foule dans laquelle il transvase la liqueur enivrante. La littérature va du moi confus et aphasique au moi informé par l’intermédiaire des mots, rien de plus : le public n’est admis à cet acte d’autosatisfaction qu’au titre de voyeur, et généralement contre espèces – et c’est, je le concède, dans cette affaire, le côté peu ragoûtant.
  • En lisant en écrivant, Julien Gracq, éd. José Corti, 1981, p. 159


Si vous voulez devenir écrivain, il y a avant tout deux choses que vous devez impérativement faire : lire beaucoup et beaucoup écrire. Il n'existe aucun moyen de ne pas en passer par là, aucun raccourci.
  • Écriture : Mémoires d'un métier, Stephen King (trad. William Olivier Desmond), éd. Le Livre de Poche, 2003  (ISBN 2-253-15145-9), p. 170


Écrire de la fiction en Amérique en ce début du vingt et unième siècle n'est pas un boulot pour les froussards intellectuels. Ce ne sont pas les censeurs autoproclamés qui manquent et, bien qu'ils puissent avoir des priorités différentes, ils veulent tous, au fond, la même chose : que vous voyiez le monde comme eux le voient… ou au moins que vous la fermiez sur ce que vous ne voyez pas comme eux. Ce sont les représentants du statu quo. Pas nécessairement méchants, mais dangereux à partir du moment où vous croyez en la liberté de penser par vous-même.
  • Écriture : Mémoires d'un métier, Stephen King (trad. William Olivier Desmond), éd. Le Livre de Poche, 2003  (ISBN 2-253-15145-9), p. 222


Mettez votre bureau dans un coin et, chaque fois que vous vous y installerez pour travailler, rappelez-vous pour quelle raison il n'est pas au milieu de la pièce. La vie n'est pas un système logistique destiné à soutenir l'art. C'est le contraire.
  • Écriture : Mémoires d'un métier, Stephen King (trad. William Olivier Desmond), éd. Le Livre de Poche, 2003  (ISBN 2-253-15145-9), p. 122


Georges Leconte

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Pourquoi j’écris ? (…) Car il n'est aucun mode d'expression qui donne aussi bien le sentiment de la pleine liberté. Devant son papier blanc, l'écrivain a la joie et la fierté de sentir qu'il ne dépend que de lui-même. Et c'est une des plus nobles joies.
  • George Lecomte, Président de la Société des Gens de Lettres, donne suite à une enquête concernant son statut d'écrivain menée par le mensuel surréaliste Littérature, ce sur plusieurs numéros.
  • « Notre enquête — Pourquoi écrivez-vous ? », George Lecomte, Littérature, nº 10, Décembre 1919, p. 23


La Règle du jeu : dont les quatres tomes, si longs à rédiger que leur établissement m'occupa depuis les approches de l'âge mûr jusqu'à un point déjà avancé de ma vieillesse, illustrent à merveille cette ironie : avoir prétendu écrire pour arriver à mieux vivre et n'avoir au bout du compte mené à peu près rien d'autre qu'une vie d'écrivain.


H. R. Lenormand

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J'écris, comme tout écrivain, pour affirmer des tendances intimes refoulées dans la vie réelle. Je crois que l'œuvre d'art pourrait être définie une compensation du réel. Nos instincts révolutionnaires et sexuels, nos instincts de domination et de connaissance ne peuvent se satisfaire pleinement au cours de la vie. Leur refoulement produit une sublimation qui donne naissance à l'œuvre d'imagination. Celle-ci n'est donc que l'épanouissement de vélléités contrariées. Elle peut, dans les cas de refoulement excessifs, aboutir à une contradiction complète et magnifique de l'existence effective de l'écrivain.
Les atrocités sans frein des ouvrages du Marquis de Sade peuvent s'expliquer par le fait qu'il écrivit surtout en prison. L'outrance de ses inventions me ferait plutôt croire à la non-réalisation de ses tendances érotiques. C'est une revanche du rêve sur la réalité.
En ce qui me concerne, il n'y a pas lieu de douter que certaines de mes pièces, Poussière, les Possédés, Terres chaudes, entre autres, sont une tentative de compensations d'instincts révolutionnaires entravés et de désirs de voyages incomplètement satisfaits.

  • H. R. Lenormand donne suite à une enquête concernant son statut d'écrivain menée par le mensuel surréaliste Littérature, ce sur plusieurs numéros.
  • « Notre enquête — Pourquoi écrivez-vous ? », H. R. Lenormand, Littérature, nº 11, Décembre 1920, p. 24


Imbécile ! criait-il à son image dans le miroir. Tu voulais écrire, tu essayais d’écrire. Qu’est-ce que tu avais dans le ventre ? Quelques notions enfantines, quelques sentiments encore imprécis, beaucoup de beauté mal digérée, une énorme ignorance, un cœur plein d’amour à en éclater, une ambition aussi grande que ton amour, que ton ignorance. Et tu voulais écrire ! mais tu commences aujourd'hui seulement à acquérir en toi ce qu’il faut pour ça ! Tu voulais créer de la beauté ! et tu ne savais rien de ce qui fait la beauté ! Tu voulais parler de la vie, et tu ignorais tout ce qui fait l'essence même de la vie ! Tu voulais parler de l’univers et des problèmes de l’existence, quand l’univers n’était pour toi qu’un rébus chinois ! Mais courage, Martin, mon vieux ! Il y a de l’espoir, cette fois, bien que tu sois encore très ignorant. Un beau jour, avec de la chance, tu sauras à peu près tout ce qu’on peut savoir. Ce jour là tu écriras.


— Mais… si toutes les portes sont fermées ainsi que vous le démontrez, comment les grands écrivains ont-ils fait pour arriver ?…
— En accomplissant l’impossible, répondit-il. Ils ont fait des choses si merveilleuses, si inouïes, qu'à leur flamme les portes d’airains ont fondu. Ils sont arrivés par miracle, à mille contre un. Ils sont arrivés, parce qu’ils étaient pareils aux « géants balafrés » de Carlyle, que rien ne peut abattre. Et voilà ce qu'il faut que j’accomplisse : l'impossible.


Giovanni Macchia

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Derrière les livres des Goncourt et des autres maîtres de « l'écriture artiste », on devinait des êtres écorchés vifs par les sensations, sanguinolents, soumis à une épuisante autopsie mentale, habitués à se nourrir de fruits secs, voués au désolant labeur de l'écrivain qui observe, qui s'acharne à tout extraire de ses propres fibres pour le transcrire sur le papier.
  • « L'Homme de la mort — La présence du prédécesseur », Giovanni Macchia, Chateaubriand — Revue Littéraire Europe (ISSN 0014-2751), nº 775-776, Novembre-décembre 1993, p. 9


Si l'on adopte la ligne de partage très sommaire qui distingue les écrivains selon qu'ils doivent être lus avec les yeux ou avec la voix, on rangera sans aucun doute Chateaubriand dans la deuxième catégorie.
  • « L'Homme de la mort — La présence du prédécesseur », Giovanni Macchia, Chateaubriand — Revue Littéraire Europe (ISSN 0014-2751), nº 775-776, Novembre-décembre 1993, p. 9


Après la première grande tentative d'interprétation proposée par Sainte-Beuve, dont la mesure se trouvait dans un jeu de reconnaissances et de repentirs, on vit s'esquisser un processus de mythification de l'écrivain, où la raison critique s'éclipsait tandis qu'étaient exaltés des motifs irrationnels, presque mystiques : le mystère d'une créativité qui loge dans une tournure, une phrase, une page, et qui de cette page se transmet à l'œuvre et à l'homme qui l'a composée, de même qu'un brin d'herbe contient le miracle de l'entière création.
  • « L'Homme de la mort — Mythification de l'écrivain », Giovanni Macchia, Chateaubriand — Revue Littéraire Europe (ISSN 0014-2751), nº 775-776, Novembre-décembre 1993, p. 10


En régime démocratique, on ne peut ni empêcher un écrivain notoire de publier ses livres, ni le déporter, ni le fusiller, mais il existe d'autres manières, plus subtiles et feutrées, non moins efficaces, d'étouffer un homme et une œuvre, de les tenir dans l'illégitimité.


Celui qui a reçu le terrible pouvoir de brûler avec des mots n'a pas le droit d'en user avec légèreté : quand on trempe sa plume dans ce curare irrémissible que peut d'aventure être la langue française, il faut savoir ne flécher qu'à bon escient.


Les indignations des littérateurs sont des indignations suspectes : nous souffrons d'ordinaire d'une telle hypertrophie du moi, nous sommes si obstinément jaloux de notre personnage, que le public aurait tort d'être embéguiné de notre intérêt pour les nobles causes : nous pouvons bien écrire des libelles enflammés sur Dieu ou sur le peuple, nous ne serons jamais que des chrétiens douteux et des révolutionnaires de comédie. Le christianisme et l'ouvriérisme supposent l'oubli de soi, et si habiles que nous soyons à travestir les paroles de l'amour-propre sous le nom du souci de l'honneur divin et de la félicité populaire, cet oubli de soi est bien ce dont nous sommes le moins capables.


La longueur de ses lettres, vingt à trente pages, reflète bien son envergure. Son torrent m'emporte avec violence. Je désire être seulement une femme. Non pas écrire des livres, ni affronter directement le monde, mais vivre par transfusions sanguines littéraires. Me tenir derrière Henry, le nourrir. Me reposer de toute création, de toute tentative de m'affirmer.
  • Il est question d’Henry Miller
  • Henry et June — Les cahiers secrets (1986), Anaïs Nin (trad. Béatrice Commengé), éd. Stock, 2007  (ISBN 978-2-234-05990-0), Août (1932), p. 261


L'écrivain se drape dans son humanité, mais ce n'est qu'un camouflage.
  • Henry et June — Les cahiers secrets (1986), Anaïs Nin (trad. Béatrice Commengé), éd. Stock, 2007  (ISBN 978-2-234-05990-0), Août (1932), p. 280


Peut-être Bach et Mozart composaient-ils des cantates et des airs d'opéra pour exprimer leur joie. Peut-être les peintres peignent-ils parce que le monde est beau. Je crois que les écrivains écrivent parce qu'ils éprouvent du chagrin. Je crois qu'il y a des livres parce qu'il y a du mal dans le monde et dans le cœur des hommes. Personne n'écrirait s'il n'y avait pas d'histoire. Et le moteur de l'histoire, c'est le mal.


Le XVIIe est un siècle d'écrivains. le XVIIIe est un siècle d'intellectuels.


Pour moi, être écrivain, c'est découvrir patiemment, au fil des années, la seconde personne, cachée, qui vit en nous, et un monde qui sécrète notre seconde vie : l'écriture m'évoque en premier lieu, non pas les romans, la poésie, la tradition littéraire, mais l'homme qui, enfermé dans une chambre, se replie sur lui-même, seul avec les mots, et jette, ce faisant, les fondations d'un nouveau monde.


L'homme construit des maisons parce qu'il est vivant, mais il écrit des livres parce qu'il se sait mortel.


Ah ! quelle chose exquise que cette dévotion de certains cœurs, souvent solitaires, à un écrivain dont ils vivent l'œuvre et cherchent partout les traces !


Les académiciens sont persuadés que le rêve d'un écrivain est d'entrer à l'Académie.


Les tenants de plume littéraire dans les journaux obéissent, pour la plupart, aux haines que fomente en eux leur triste dépendance. Or, la plupart aussi des écrivains dépendant de quelque chose, l'écrivain totalement indépendant est leur ennemi naturel. Ces haines se manifestent, soit par action, soit par omission.


Les écrivains sont incorrigibles : même quand ils parlent de se taire, ils ne résistent pas à la tentation de raconter leur silence.


De toute façon vous l'inventerez. Les écrivains ont en commun avec les tyrans de plier le monde à leur désir.
  • L'aube le soir ou la nuit, Yasmina Reza, éd. Flammarion, 2007  (ISBN 9782081209169), p. 9


Personne ne peut vous apporter conseil ou aide, personne. Il n'est qu'un seul chemin. Entrez en vous-même, cherchez le besoin qui vous fait écrire : examinez s'il pousse ses racines au plus profond du cœur. Confessez-vous à vous-même : mourriez-vous s'il vous était défendu d'écrire ? Ceci surtout : demandez-vous à l'heure la plus silencieuse de votre nuit : « Suis-je vraiment contraint d'écrire ? »


Diderot est un homme consolant à voir et à considérer. Il est le premier grand écrivain en date qui appartienne décidément à la moderne société démocratique. Il nous montre le chemin et l'exemple : être ou n'être pas des académies, mais écrire pour le public, s'adresser à tous, improviser, se hâter sans cesse, aller au réel, au fait, même quand on a le culte de la rêverie ; donner, donner, donner encore, sauf à ne recueillir jamais ; plutôt s'user que se rouiller, c'est sa devise. Voilà ce qu'il a fait jusqu'à la fin, avec énergie, avec dévouement, avec un sentiment parfois douloureux de cette déperdition continuelle.
  • Les Lumières et les Salons — Anthologie établie et présentée par Pierre Berès, Charles-Augustin Sainte-Beuve, éd. Hermann (éditeurs des sciences et des arts), coll. « Collection savoir : lettres », 1992  (ISBN 2-7056-6178-6), partie Diderot, 20 janvier 1851. Causeries du lundi, t. III, p. 54


Ce qui constitue le vrai talent pour un écrivain ou pour un artiste, c'est d'exprimer de façon rare des pensées communes, ou mieux encore de façon commune des pensées rares.
  • La Proie du néant, notes d'un pessimiste, Edmond Thiaudière, éd. Paul Ollendorff, 1886, chap. L'Art et la Science, p. 167


D'une certaine façon, [...] ceux qui manient la plume [...] peuvent être dangereux. On les suspectent tout de suite de mentir, de ne pas être eux-mêmes, de n'être qu'un œil qui ne cesse d'observer, transformant en phrase tout ce qu'il voit ;tant et si bien qu'un écrivain dépouille la réalité de ce qu'elle contient de plus important : l'indicible.
  • Sur les ossements des morts, Olga Tokarczuk, éd. Libretto, 2014  (ISBN 978-2-36914-115-0), chap. 4 (« Neuf cent quatre-vingt-dix-neuf morts »), p. 64


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