Souffrance
La Souffrance désigne la douleur physique ou morale, état de l'être vivant (humain ou animal) qui souffre.
Littérature et mémoires
[modifier]Notre pays, me disais-je, depuis la dernière révolution, n'a pas repris son équilibre. Deux classes de la société, la noblesse et le peuple, sont en proie à de vives souffrances ; l'une subit un mal imaginaire, l'autre un mal réel ; la noblesse, parce qu'elle se voit dépouillée de ses privilèges et de ses honneurs par une bourgeoisie arrogante ; le peuple, parce que le triomphe de cette bourgeoisie, amenée par lui au pouvoir, n'a été qu'une déception cruelle.
- Nélida (1866), Marie d'Agoult, éd. Calmann-Lévy, 2010 (ISBN 978-2-7021-4127-4), partie Quatrième partie, chap. XXIII, p. 272
C'est parce que chacun cherche à tout prix à souffrir le moins possible que la vie est infernale.
- L'Amour fou, André Breton, éd. Gallimard, 1976 (ISBN 978-2070367238), p. 69 (voir la fiche de référence de l'œuvre)
Je sentais de la vie qu'il en restait encore beaucoup en dedans, qui se défendait pour ainsi dire. J'aurais jamais cru ça possible si on m'avait raconté. Je marchais même pas trop mal à présent, enfin deux cent mètres à chaque coup. C'était abominable partout comme souffrance, du bas du genou au dedans de la tête. L'oreille c'était la bouillie sonore à part ça, les choses n'étaient pas tout à fait les mêmes ni plus comme avant. Elles avaient l'air en mastic, les arbres pas fixés du tout, la route sous mes godasses faisait des montées et des petites descentes. j'avais plus rien sur moi que ma tunique et de la pluie. Toujours personne. Ma torture de tête je l'entendais bien fort dans la campagne si grande et si vide.
Y avait bien encore quatre heures de marche à cloche-pied comme on allait, à travers les sentiers et surtout les champs. Je voyais plus très clair mais je voyais rouge par dessus. Je m'étais divisé en parties tout le corps. La partie mouillée, la partie qu'était saoule, la partie du bras qu'était atroce, la partie de l'oreille qu'était abominable, la partie de l'amitié pour l'anglais qu'était bien consolante, la partie du genou qui s'en barrait comme au hasard, la partie du passé déjà qui cherchait, je m'en souviens bien, à s'accrocher au présent et qui pouvait plus — et puis alors l'avenir qui me faisait plus peur que tout le reste, enfin une drôle de partie qui voulait par-dessus les autres me raconter une histoire. C'était plus même du malheur qu'on peut appeler ça, c'était drôle.
Les chercheurs du vrai et du beau savent que sur la Voie, la souffrance est un passage obligé par lequel on peut atteindre la lumière.
Dans le gouffre tragique d’un monde enténébré, au plus noir de la vie, la moindre lueur est signe de vie, une luciole qui passe, une étoile qui file, un feu qui prend… Je dirais une fois encore que chaque âme, aussi fragile et minime soit-elle, est invitée à témoigner de son vécu, d’un destin entrelacé d’enchantement, d’allégresse, de douleur, de frayeur, de remords, de regrets. Tout est appel, tout est signe. Tel est le sens de la Voie, laquelle doit continuer sa marche de transmutation et reprendre un jour tout ce qui est de Vie.
Seamus avec qui nous dînâmes à Ennis me dit :
– Ça y est, ce n'est plus Bébé Jerry… Oh oui, je sais ce genre de durcissement coûte cher, mais cela en vaut la peine. L'idée chrétienne de la rédemption par la souffrance n'est pas aussi absurde qu'elle en a l'air. Son application laïque est intéressante.
- Un taxi mauve, Michel Déon, éd. Gallimard, coll. « nrf », 1973, p. 312
Pendant son agonie, frère Pierre lui a souvent posé cette question : « Frère Vincent, est-ce vraiment si difficile à porter ? Est-ce que vous souffrez beaucoup ? » Il répondait « oui » d’un clignement d'œil. Son angoisse, sa détresse, sa terreur faisaient mal à ses frères. Les maux physiques sont difficiles, mais les souffrances morales sont incommensurables. L'évidence de n’être plus rien, de perdre les capacités les plus élémentaires, est plus profonde encore que les grandes blessures physiques. A trente cinq ans, frère Vincent n'avait plus de rêve.
- Un temps pour mourir. Derniers jours de la vie des moines, Nicolas Diat, éd. Fayard, 2018 (ISBN 978-2213705637), p. 42
La souffrance révèle à chacun ses limites. Le laïc comme le moine peuvent devenir des nains ou des géants.
- Un temps pour mourir. Derniers jours de la vie des moines, Nicolas Diat, éd. Fayard, 2018 (ISBN 978-2213705637), p. 69
Les personnes qui n'ont jamais connu la souffrance doivent éviter d'en parler à ceux qui la ressentent. La souffrance est un grand mystère. Elle est toujours mauvaise. Le moine s'offre à Dieu pour prier et il donne sa vie à l'Eglise. La dernière étape, même dans la peur, est désirée et connue. Le moine reste radicalement un homme, et il tend vers le divin.
- Un temps pour mourir. Derniers jours de la vie des moines, Nicolas Diat, éd. Fayard, 2018 (ISBN 978-2213705637), p. 81, 82
Dom Patrick pense souvent aux paroles du cardinal Pierre Veuillot sur son lit de mort, après qu'il a livré un long combat contre une leucémie douloureuse : « Nous savons faire de belles phrases sur la souffrance. Moi-même j’en ai parlé avec chaleur. Dites aux prêtres de n’en rien dire : nous ignorons ce qu’elle est, et j'en ai pleuré. » Devant un homme qui souffre, les beaux discours ne servent à rien. Ils peuvent uniquement satisfaire les biens portants.
- Un temps pour mourir. Derniers jours de la vie des moines, Nicolas Diat, éd. Fayard, 2018 (ISBN 978-2213705637), p. 123
Dolman se lassa de son image aqueuse et ordonna à nouveau la mise en route de la communauté. Les villageois ensablés arrachèrent leurs enfants aux cocotiers et repartirent en se lamentant sur les chemins de la forêt. Dolman était lourd d'angoisse. Il retrouva sa hutte et ses vieilles habitudes sans plaisir. L'insatisfaction usait ses méninges, et un désir galopant gonflait ses poumons comme un caillot de sang. La mort acheta un billet de loterie en son nom.
C'est alors que le Diable intervint. Ne pouvant accepter l'évasion d'une de ses créatures, il quitta sa tour de silence et accourut, détermine à enfermer Dolman dans les perspectives toujours changeantes d'une souffrance sans issue. On pense bien qu'il ne pouvait permettre l'anéantissement de la fange, il en avait trop besoin pour consolider son règne..
- « Dolman le maléfique », Joyce Mansour, La Brèche, nº 1, Octobre 1961, p. 50
Mo Yan
[modifier]- L’auteur est Chinois
- Beaux seins, belles fesses (2001), Mo Yan (trad. N. et L. Dutrait), éd. Seuil, coll. « Points », 2004 (ISBN 9 782020 799096), chap. 51, p. 749
- Nouvelles histoires extraordinaires (1857), Edgar Allan Poe (trad. Charles Baudelaire), éd. Gallimard, coll. « Folio Classiques », 2006 (ISBN 978-2-07-033897-9), Colloque entre Monos et Una, p. 288
J’admire comme l’on s’accoutume
aux maux et aux incommodités.
Qui m’aurait fait voir tout d’une vue
tout ce que j’ai souffert,
je n’aurais jamais cru y résister,
et jour à jour me voilà.
- 24 mars 1676, tome 2
- Madame de Sévigné, Geneviève Haroche-Bouzinac, éd. Flammarion, 2023, p. 313
Léon Silbermann
[modifier]- D'un médecin à l'enterrement d'un de ses infirmiers
Leon Silbermann, Souvenirs de campagne, Plon, Paris, 1910, p. 59
Peter Singer, La libération animale (1975)
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- La religion contre l'humanité, Apologie du blasphème, Jean-Paul Gouteux, éd. matériologiques, 2011, p. 66
- Mère Teresa, il n'est de plus grand amour, Mère Teresa (trad. Marie-Grabielle Zanetto), éd. Presses du Châtelet, 2016 (ISBN 978-2-84592-688-2), p. 126, 127
Psychologie. Psychanalyse
[modifier]- La Résilience — Surmonter les traumatismes, Marie Anaut, éd. Armand Colin, coll. « 128 », 2008 (ISBN 978-2-200-35348-3), Introduction, p. 9
Gérard Pirlot/Jean-Louis Pedinielli
[modifier]- Les Perversions sexuelles et narcissiques, Gérard Pirlot/Jean-Louis Pedinielli, éd. Armand Colin, coll. « 128 Psychologie », 2005 (ISBN 2-200-34042-7), Introduction, p. 7
- Les Perversions sexuelles et narcissiques, Gérard Pirlot/Jean-Louis Pedinielli, éd. Armand Colin, coll. « 128 Psychologie », 2005 (ISBN 2-200-34042-7), partie IV. Perversions narcissiques, chap. 1. Pourquoi l'extension du terme ?, 1.4 Perversion narcissique b) Pathologie du narcissisme, p. 105
- Pensée perverse et décervelage, 1992, Préambule, dans [1], paru Trait pour trait Mouvement de travail et de recherche autour de la psychanalyse, Paul-Claude Racamier.