Médée (Corneille)
Médée est une tragédie en cinq actes écrite par Pierre Corneille en 1635. Inspirée de la mythologie grecque et de plusieurs pièces de théâtre antiques et modernes, elle met en scène la vengeance exercée par la magicienne Médée contre son mari Jason.
Citations
[modifier]Jason : Aussi je ne suis pas de ces amants vulgaires ;
J’accommode ma flamme au bien de mes affaires ;
Et sous quelque climat que me jette le sort,
Par maxime d’État je me fais cet effort.
Nous voulant à Lemnos rafraîchir dans la ville,
Qu’eussions-nous fait, Pollux, sans l’amour d’Hypsipyle ?
Et depuis à Colchos, que fit votre Jason,
Que cajoler Médée et gagner la toison ?
Alors, sans mon amour, qu’eût fait votre vaillance ?
Eût-elle du dragon trompé la vigilance ?
Ce peuple que la terre enfantait tout armé,
Qui de vous l’eût défait, si Jason n’eût aimé ?
Maintenant qu’un exil m’interdit ma patrie,
Créuse est le sujet de mon idolâtrie ;
Et j’ai trouvé l’adresse, en lui faisant la cour,
De relever mon sort sur les ailes d’Amour.
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte I, scène 1, p. 343 (texte intégral sur Wikisource)
Jason : (...) Le jour découvre à tous les crimes de la nuit. (...)
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte I, scène 1, p. 346 (texte intégral sur Wikisource)
Jason : Depuis que mon esprit est capable de flamme,
Jamais un trouble égal n’a confondu mon âme.
Mon cœur, qui se partage en deux affections,
Se laisse déchirer à mille passions.
Je dois tout à Médée, et je ne puis sans honte
Et d’elle et de ma foi tenir si peu de conte :
Je dois tout à Créon, et d’un si puissant roi
Je fais un ennemi, si je garde ma foi :
Je regrette Médée, et j’adore Créuse ;
Je vois mon crime en l’une, en l’autre mon excuse ;
Et dessus mon regret mes désirs triomphants
Ont encor le secours du soin de mes enfants.
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte I, scène 2, p. 348 (texte intégral sur Wikisource)
Médée : Jason me répudie ! et qui l’aurait pu croire ?
S’il a manqué d’amour, manque-t-il de mémoire ?
Me peut-il bien quitter après tant de bienfaits ?
M’ose-t-il bien quitter après tant de forfaits ?
Sachant ce que je puis, ayant vu ce que j’ose,
Croit-il que m’offenser ce soit si peu de chose ?
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte I, scène 4, p. 351-352 (texte intégral sur Wikisource)
Médée : Déchirer par morceaux l’enfant aux yeux du père
N’est que le moindre effet qui suivra ma colère ;
Des crimes si légers furent mes coups d’essai :
Il faut bien autrement montrer ce que je sai ;
Il faut faire un chef-d’œuvre, et qu’un dernier ouvrage
Surpasse de bien loin ce faible apprentissage.
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte I, scène 4, p. 352-353 (texte intégral sur Wikisource)
Nérine : Les plus ardents transports d’une haine connue
Ne sont qu’autant d’éclairs avortés dans la nue,
Qu’autant d’avis à ceux que vous voulez punir,
Pour repousser vos coups, ou pour les prévenir.
Qui peut sans s’émouvoir supporter une offense,
Peut mieux prendre à son point le temps de sa vengeance ;
Et sa feinte douceur, sous un appas mortel,
Mène insensiblement sa victime à l’autel.
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte I, scène 5, p. 354 (texte intégral sur Wikisource)
Médée : Quiconque sans l’ouïr condamne un criminel,
Son crime eût-il cent fois mérité le supplice,
D’un juste châtiment il fait une injustice.
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte II, scène 2, p. 361 (texte intégral sur Wikisource)
Ægée : Quand on connaît sa faute, on manque doublement.
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte II, scène 5, p. 372 (texte intégral sur Wikisource)
Médée : Il n’est point de climat dont mon amour fatale
N’ait acquis à mon nom la haine générale ;
Et ce qu’ont fait pour vous mon savoir et ma main
M’a fait un ennemi de tout le genre humain.
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte III, scène 3, p. 379 (texte intégral sur Wikisource)
Médée : Celui-là fait le crime à qui le crime sert.
- Œuvres (1635), Pierre Corneille, éd. Marty-Laveaux, 1862, t. 2, Médée, acte III, scène 3, p. 382 (texte intégral sur Wikisource)