Jean-Christophe Rufin
Jean-Christophe Rufin, né à Bourges dans le Cher le 28 juin 1952 est voyageur, médecin, écrivain et diplomate français, membre de l'Académie française. Ancien directeur d'Action contre la faim, il fut également ambassadeur de France au Sénégal et en Gambie de 2007 à 2010. Son roman Rouge Brésil, qui raconte la déconvenue de la France antarctique, lui vaut le le prix Goncourt en 2001.
- L’Abyssin, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard (ISBN 2-07-074652-6)., 1997, p. 9
Rouge Brésil, 2001
[modifier]- Rouge Brésil, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2001, p. 38
- Rouge Brésil, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2001, p. 113
- Rouge Brésil, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2001, p. 146-47
- Rouge Brésil, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2001, p. 321
- Rouge Brésil, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2001, p. 420
- Rouge Brésil, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2001, p. 435
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Pujols à l'Universal Herald, p. 120
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), association Walden, p. 186
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), le Fraiseur, p. 218-219
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), ancêtre des Fraiseurs chez Ford, à Detroit, p. 220-221
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Pujols, p. 250
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Paul Wise à Walden, p. 279
il avait une envie profonde de s'autoriser la sincérité. Un instant, il se sentit vieux, misérable et sale, impuissant surtout, terriblement impuissant.
— Le Président, soupira-t-il… Croyez-vous qu'il ait la moindre autorité sur ces choses ?
(…)
— Vous savez ce que c'est notre métier ? commença-t-il. Du théâtre, voilà tout. Nous représentons, cela dit bien ce que cela veut dire.
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Kate chez le sénateur, p. 290-291
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Kate chez le sénateur, p. 292
- Citation choisie pour le 23 avril 2017.
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Kate chez le sénateur, p. 293
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Baïkal chez les Déchus, p. 354
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Baïkal chez les Fraiseurs, p. 377
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Réunion des oligarques, p. 470
- Il s'agit d'un syllogisme
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Pujols à l'Universal Herald, p. 120
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Wise à Puig Pujols, p. 277
- Globalia, Jean-Christophe Rufin, éd. Folio, 2005 (ISBN 2-07-030918-5), Ron Altman à Patrick, p. 490
La Salamandre, 2005
[modifier]- La Salamandre, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard,en « Folio » (ISBN 2-07-032876-7)., 2005, p. 9
- La Salamandre, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard,en « Folio » (ISBN 2-07-032876-7)., 2005, p. 9-10
- La Salamandre, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard,, 2005 (ISBN 2-07-077410-4), p. 59
- La Salamandre, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard,, 2005 (ISBN 2-07-077410-4), p. 108
- La Salamandre, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard,, 2005 (ISBN 2-07-077410-4), p. 112
- La Salamandre, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard,, 2005 (ISBN 2-07-077410-4), p. 156
— Claudio.
— Et moi, sais-tu comment je m'appelle ?
— Conceição.
Catherine réfléchit un instant puis lui caressa la tête.
- La Salamandre, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard,, 2005 (ISBN 2-07-077410-4), p. 197
Virginie, la femme de chambre, était descendue en courant pour prévenir le gérant et l’avait trouvé dans son bureau. Sitôt arrivé le matin, il s’y enfermait et allumait la télévision. Ce jour-là, la première chaîne retransmettait la visite de Gorbatchev aux États-Unis. La grande affaire du moment, c’était l’effondrement de l’URSS qui se déroulait en direct.
- Sept histoires qui reviennent de loin, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2011 (ISBN 978-2-298-05178-0), p. 11
Le Grand Cœur, 2012
[modifier]Je sais qu'il est venu pour me tuer. C'est un petit homme trapu qui n'a pas les traits phéniciens des gens de Chio. Il se cache comme il peut, mais je l'ai remarqué à plusieurs reprises dans les ruelles de la ville haute et sur le port.
- Incipit
- Le Grand Cœur, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, coll. « nrf », 2012 (ISBN 978-2-07-011942-4), p. 13
Le Collier rouge, 2014
[modifier]À une heure de l'après-midi, avec la chaleur qui écrasait la ville, les hurlements du chien étaient insupportables. Il était là depuis deux jours, sur la place Michelet, et depuis deux jours il aboyait. C'était un gros chien marron à poils courts, sans collier, avec une oreille déchirée. Il jappait méthodiquement, une fois toutes les trois secondes à peu près, d'une voix grave qui rendait fou.
- Incipit
- Le collier rouge, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2014 (ISBN 978-2-07-013797-8), p. 9
Sur le bat-flanc, en face du juge, l'homme s'était enfin redressé. Il était en nage sous sa couverture, les joues rouges, les cheveux en bataille. Mais son regard n'était pas brouillé. Il s'assit sur le bord du lit, en laissant pendre ses jambes nues. Il passa sa main sur sa nuque avec une grimace et s'étira. Puis il fixa le juge qui était assis, le dossier sur les genoux, et souriait d'un air las.
– Non, dit l'homme. Je n'étais pas saoul. Et je ne regrette rien.
- Le collier rouge, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2014 (ISBN 978-2-07-013797-8), p. 21
L'homme avait parlé assez bas et sa voix était sourde. Il est impossible qu'on l'eût entendu du dehors. Pourtant, le chien, sur la place, s'était aussitôt remis à hurler.
Le juge, machinalement, regarda vers la porte.
– En voilà un, au moins, qui tient à vous. Il n'y a personne d'autre qui tienne à vous, caporal ? Personne qui préférerait que vous sortiez de cette regrettable affaire et que vous soyez libre ?
– Je vous le répète, répondit Morlac. Mes actes, j'en suis responsable et je ne vois aucune raison de m'excuser.
- Le collier rouge, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2014 (ISBN 978-2-07-013797-8), p. 23
L'officier était un homme de la ville. Il était né à Paris et y avait toujours vécu. Il avait souvent remarqué, avec ses hommes, à quel point citadins et paysans voyaient l'arrière différemment. Pour l'homme des villes, l'arrière, c'était le plaisir, le confort, la lâcheté, en somme. Pour celui des campagnes, l'arrière, c'était la terre, le travail, un autre combat.
- Le collier rouge, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2014 (ISBN 978-2-07-013797-8), p. 28
Morlac haussa les épaules. Il regardait ses mains.
– Je crois que la vraie différence avec les bêtes, poursuivit le juge, ce n'est pas la fidélité. Le trait le plus proprement humain et qui leur fait complètement défaut, c'est un autre sentiment, que vous avez du reste.
– Lequel ?
– L'orgueil.
- Le collier rouge, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2014 (ISBN 978-2-07-013797-8), p. 148
Par moments, Lantier se retournait vers la banquette arrière et jetait un coup d'œil pour s'en assurer : non vraiment, ce n'était pas un très beau cadeau. Ou plutôt, c'était à lui seul qu'il le faisait.
Il tendait le bras et sentait les vieilles bajoues sur sa main. Quel drôle de cadeau, décidément.
– Pas vrai, Guillaume ? criait-il.
Et le chien, lui aussi, avait l'air de sourire.
- Le collier rouge, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2014 (ISBN 978-2-07-013797-8), p. 154
Check-Point, 2015
[modifier]– Passe moi les jumelles.
- Incipit
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 11
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 64
Maud se demandait pourquoi elle l'écoutait. Pourtant, il avait tapé juste, peut-être par hasard. Cette question, elle se l'était posée aussi. Il y avait une guerre ; on commettait des horreurs. Et elle, qu'est-ce qu'elle faisait ? Elle apportait du chocolat et des pansements. Elle avait fini par accepter cet état de fait comme une singularité des temps. C'était comme ça et, au fond, elle ne voyait pas ce qu'elle pouvait faire d'autre. Mais elle n'en ressentait pas moins un certain malaise, une certaine honte.
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 86
– Quand même, insista Maud, on doit pouvoir l'empêcher de nuire. Vous êtes nombreux, vous pouvez en venir à bout facilement...
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 181
– Non.
– C'est le charnier...
– Oui.
Elle était surprise qu'il avoue si franchement son émotion.
– tu as dû en voir d'autres, pourtant.
– Justement.
Ils avaient dépassé la limite des forêts et devant eux le paysage ondulait à perte de vue. Il descendait en pente douce jusqu'à une vallée invisible puis, tout à coup, butait contre la barrière lointaine des montagnes enneigées.
– C'est même pour ça que j'ai quitté l'armée.
– Parce que tu ne supportais pas les massacres ?
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 188
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 215
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 280
- Postface, explications de l'auteur sur le thème du roman.
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 385
Des victimes que l'on a envie d'aimer d'un amour particulier : celui qui incite à prendre les armes.
- Postface, explications de l'auteur sur le thème du roman.
- Check-Point, Jean-Christophe Rufin, éd. Gallimard, 2015 (ISBN 978-2-07-014641-3), p. 387
Le Suspendu de Conakry, 2018
[modifier]La foule regardait le corps suspendu. Une ligne continue d'Africains, hommes, femmes, enfants, occupait le quai et toute la digue jusqu'à la bouée rouge qui marquait l'entrée de la marina de Conakry.
- incipit
- Le Suspendu de Conakry, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2018 (ISBN 978-2-0814-1693-2), p. 7
– Vous pleuriez ?
– Je ne sais pas ce qui s'est passé dans ma tête. J'étais complètement découragé. Jusque-là, j'avais tout subi sans perdre espoir, le communisme, la prison, l'exil, la pauvreté, ces petits boulots ; j'avais perdu de vue ma famille, mon pays d'origine, si affreux qu'il ait pu être, et pour quoi finalement ? Pour en arriver là. Dans ce cloaque. Vous comprenez ça, Jocelyne ?
- Le Suspendu de Conakry, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2018 (ISBN 978-2-0814-1693-2), p. 190
Vous savez, pour moi, les femmes sont des êtres surnaturels, infiniment précieux. J'avais le modèle de ma mère et de ma grand-mère : elles étaient le moteur de tout. La famille reposait sur elles et je pensais que le monde entier était ainsi, qu'il tournait autour de ces atomes de grâce et de bonté que sont les femmes.
– Vous le pensez toujours ?
– Hélas, j'ai compris que le monde n'était pas ainsi. Je sais que les femmes exceptionnelles sont rares. Mais je continue de les chercher et il s'en trouve.
- Le Suspendu de Conakry, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2018 (ISBN 978-2-0814-1693-2), p. 192
Aurel vit qu'elle souriait de toutes ses dents. Presque aussitôt, c'est son rire qui rententit, un rire libérateur, qui emportait au loin tous les miasmes de l'angoisse, les noires humeurs du regret et de l'envie. Aurel hésita un instant puis se mit à rire à son tour. Aux tables alentour, les dîneurs les regardaient. Quand le fou rire finit par s'arrêter, ils avaient les larmes aux yeux.
- Le Suspendu de Conakry, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2018 (ISBN 978-2-0814-1693-2), p. 305, 306
Les Trois femmes du consul, 2019
[modifier]Il avait fini noyé au fond de sa piscine et ça n'avait surpris personne.
Depuis le temps que Béliot, le vieux Béliot, comme il se qualifiait lui-même, cultivait la haine autour de lui, il fallait bien que la violence éclate un jour. Dans la communauté des expatriés du Mozambique, il était à la fois connu de tous et tenu à l'écart. Même les Français installés sur place l'évitaient. Ils étaient pourtant peu nombreux dans cette ancienne colonie portugaise d'Afrique. Quant aux étrangers de passage, touristes, fonctionnaires internationaux ou cadres en mission pour leur entreprise, aucun ou presque ne s'aventurait chez lui.
- Incipit
- Les Trois femmes du consul, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2019 (ISBN 978-2-0814-2025-0), p. 7
Pas l'expérience ! Ce que les diplômes peuvent rendre stupide, tout de même… Aurel, sans rien laisser paraître, être affligé. Dieu sait qu'il aimait la France, pays qui l'avait littéralement racheté et tiré des griffes de Ceausescu. Mais il ne s'était jamais résolu à ce système de concours qui permettait d'obtenir à vingt ans un avantage à vie, qui classait les individus en castes et protégeait à jamais des nigauds du calibre de Mortereau.
- Les Trois femmes du consul, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2019 (ISBN 978-2-0814-2025-0), p. 64
C'était une Européenne, vêtue du même habit que la sœur tourière. Elle avait une soixantaine d'années, un visage carré et des yeux bleus qu'elle tenait grand ouverts, comme pour empêcher son interlocuteur de lui cacher la moindre parcelle d'impiété. Aurel aimait beaucoup ces regards qui vous récurent en profondeur, vous brossent l'âme et ne laissent aucun doute sur votre propre culpabilité.
- Les Trois femmes du consul, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2019 (ISBN 978-2-0814-2025-0), p. 161
– Quand quelqu'un se présentait à l'entrée du jardin, il lui suffisait de regarder de quelle couleur était la piscine pour savoir s'il pouvait approcher.
– Il y avait une couleur pour chacun ?
– Oui. Piotr, c'était rouge. Roger disait que c'était pour lui rappeler le communisme.
– Les autres ?
– Ignace, bleu.
– C'est le policier.
– L'ancien chef de la police, oui. Vert, c'était pour les chasseurs. Jaune, c'était pour Fatoumata.
– Elle aussi, elle devait respecter les couleurs ? Elle était chez elle, tout de même.
– Personne n'était chez lui, là-bas. Sauf Roger.
– Et vous ?
– Moi, c'était blanc. Ça voulait dire qu'il n'attendait personne.
- Les Trois femmes du consul, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2019 (ISBN 978-2-0814-2025-0), p. 172
– Tout le monde est content. l'ONU est contente : protection de l'environnement. Le gouvernement est content : il touche plein de subventions internationales. Les braconniers sont contents parce qu'ils se font un max de profit. Et les Chinois sont contents parce qu'ils peuvent continuer à fabriquer des boules de billard.
Puis, prenant d'un coup un air accablé, il se rassit sur le canapé.
- Il n'y a guère que les éléphants pour ne pas être contents. Mais ceux-là, tout le monde s'en fout, naturellement.
- Les Trois femmes du consul, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2019 (ISBN 978-2-0814-2025-0), p. 237
Le Flambeur de la Caspienne, 2020
[modifier]Il tenait les yeux fixés sur Aurel avec un regard si destructeur que celui-ci se sentit rabaissé au rang de bête. Encore ne s'agissait-il pas d'une bête que l'on affectionne et que l'on respecte mais d'un nuisible, d'un insecte répugnant dont la vie importe peu et que le dégoût commande d'écraser.
- Le Flambeur de la Caspienne, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2020 (ISBN 978-2-0814-2847-8), p. 26
Cette conviction soudaine faisait à Aurel l'effet d'une bouée providentielle lancée à un naufragé. Elle ne lui assurerait pas nécessairement la survie mais elle lui donnait un combat à mener. Elle désignait un but, le plus délicieux qui se puisse proposer à un être blessé : la vengeance.
Trempé, dégoulinant mais digne et surtout heureux, il retraversa toute la ville et rentra chez lui.
- Le Flambeur de la Caspienne, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2020 (ISBN 978-2-0814-2847-8), p. 33
Heureusement, ce n'est jamais en vain qu'on tend la main à un homme politique. Fût-il sur son lit de mort, il aura toujours le réflexe de la serrer et de sourire. C'est ce que fit le sénateur, puis l'esprit lui revint.
- Je croyais que nous n'avions rien de prévu aujourd'hui…
- Le Flambeur de la Caspienne, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2020 (ISBN 978-2-0814-2847-8), p. 173
L'Ambassadeur se disposait d'avance à obéir à tout, à applaudir n'importe quel propos, à approuver les décisions les plus absurdes pourvu qu'ils émanent de la divinité à laquelle, pour toujours, il avait dédié sa vie : l'autorité. Et cela, quelque forme qu'elle prît : le pouvoir politique, la richesse, la supériorité hiérarchique.
- Le Flambeur de la Caspienne, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2020 (ISBN 978-2-0814-2847-8), p. 220, 221
Il faut nommer les choses, si on veut les combattre.
- Le Flambeur de la Caspienne, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2020 (ISBN 978-2-0814-2847-8), p. 265
Amélie reconnaissait bien là l'effet du charme irrésistible de Marie-Virginie. Ce qu'elle dégageait ne relevait pas du sexe mais en avait la force. Elle suscitait un désir puissant qui ne prenait pas la forme d'une union des corps mais qui se déployait dans l'ordre de l'esprit. Le plaisir que l'on recherchait avec elle, c'était celui que l'on pouvait lui procurer en comblant ses attentes, en répondant à ses espoirs, en calmant ses doutes.
- Le Flambeur de la Caspienne, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2020 (ISBN 978-2-0814-2847-8), p. 271
Ils pouvaient tout acheter mais ne voyaient rien de désirable autour d'eux. Il fallait aller ailleurs pour convertir l'argent en plaisir, copier, copier toujours ce que d'autres avaient inventé.
Ces nouveaux riches revenaient chaque fois avec des innovations qu'ils portaient comme des habits trop grands pour eux. Paris, Londres, New York, aujourd'hui Singapour ou Shanghai leur servaient de modèle. L'ogre de la modernité dévorait tout.
- Le Flambeur de la Caspienne, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2020 (ISBN 978-2-0814-2847-8), p. 311, 312
Notre otage à Acapulco, 2022
[modifier]– Vous savez, monsieur Timescu, commença le Consul honoraire en se calant dans son fauteuil, lorsque l’on réside ici, il y a ce que l’on sait, et il y a ce que l’on peut dire. Ce n’est pas la même chose.
- Notre otage à Acapulco, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2022 (ISBN 978-2-0802-5137-4), p. 74
Acapulco était un monstre, un fantôme. La ville conservait une apparence de grâce, de volupté, de beauté, comme une revenante qui aurait pris, pour tromper les humains, l’enveloppe de chair du temps où elle était de ce monde. Mais à l’intérieur, il y avait le vide et la mort.
- Notre otage à Acapulco, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2022 (ISBN 978-2-0802-5137-4), p. 91
– Je ne sais pas si le Mexique est encore un bon pays pour y vivre. Mais cela reste un bon endroit pour mourir.
- Notre otage à Acapulco, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2022 (ISBN 978-2-0802-5137-4), p. 257
L’entrée dans Acapulco se fait progressivement. La campagne s’alourdit de bicoques. Des ateliers minuscules de réparateurs de pneus, des vendeurs de cercueils étalant leur marchandise pour tenter le chaland, des bars en plein air forment comme une gangue de misère qui s’épaissit à mesure qu’on avance vers la clarté de la mer. Encore invisible, elle illumine déjà le ciel bleu… La bousculade des constructions se fait alors sauvage. Les maisons grimpent les unes sur les autres, forment des immeubles de plus en plus hauts, que le rivage arrête finalement en un dernier bourrelet de béton. C’est la Costera.
- Notre otage à Acapulco, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2022 (ISBN 978-2-0802-5137-4), p. 260-261
Aurel perçut en elle quelque chose qu’aucune photo ne pouvait rendre. Certains êtres, et elle était de ceux-là, sont illuminés par le mouvement. En les figeant pour capter une image, on tue ce qui les rend vivants. Comme ces aliments mal cuits dont il reste la forme mais qui ont perdu leur goût, les êtres de cette qualité laissent des traces qui ne mènent pas jusqu’à eux.
- Notre otage à Acapulco, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2022 (ISBN 978-2-0802-5137-4), p. 279
Guadalupe marchait en tête, on sentait que cette fête était la sienne. Partout, on voyait d’ailleurs que les femmes étaient à l’honneur dans cette célébration. Leur capacité à donner la vie trouvait, pendant cet hommage aux morts, une confirmation de leur puissance. Au miracle de l’enfantement, qui fait sortir l’être humain du néant, s’ajoute cette autre naissance qu’est la résurrection des morts.
- Notre otage à Acapulco, Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 2022 (ISBN 978-2-0802-5137-4), p. 349