Germaine Wallon
Apparence
Germaine Wallon-Rousset (1893 à Gray, 1953 à Paris) est une psychologue française qui a travaillé au Laboratoire de Psycho-Biologie de l'enfant (1922-1962). Elle est l'épouse depuis 1917 du psychologue Henri Wallon (1879-1962).
Les notions morales chez l'enfant, 1949
[modifier]dans la première période (3 à 7 ans), l'enfant ne cite guère que des personnes de son entourage familial ou quotidien. Il ne se cite d'ailleurs lui-même qu'aux âges suivants, au contraire. Il n'y a donc pas d'égocentrisme [selon le concept de Jean Piaget] mais horizon plus limité de ses relations habituelles. C'est une simple question de fait car il peut, essentiellement, s'il s'agit d'une action qui n'est pas coutumière, comme la bravoure, chercher ses exemples dans des cercles beaucoup plus distants de sa propre existence. Il n'y a plus impuissance radicale à imaginer des scènes d'où il soit absent, mais les occasions lui manquent et sans doute aussi ses moyens d'évocation sont-ils assez pauvres, en [p. 283 >] regard du pouvoir à chaque instant exercé sur lui par ses expériences les plus coutumières.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 282
Dans la seconde période (7 à 12 ans), la qualification d'ordre professionnel ou social prend un soudain essor, mais généralement d'avantage chez les filles que chez les garçons ; elles sont plus précoces.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 283
À la troisième période (12 à 15 ans), les garçons dépassent les filles. Il se produit même parfois chez elle une régression qui n'est évidemment pas une régression d'intelligence ni de sensibilité mais qui témoigne, au contraire d'une plus grandes concentrations affectives. Les qualificatifs d'ordre moral, en effet, deviennent relativement plus nombreux. L'adolescent masculin s'épanouit vers ce qui est plus social, l'adolescente subit une attraction sentimentale.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 283
La première ressemblance fondamentale [entre les sexes], c'est la prépondérance que chacun s'attribue à lui même. Le coefficient de ces préférences est en moyenne de 3. Les adultes y ont habituellement une part beaucoup moindre que les enfants. Les variations qui se produisent dans les proportions habituelles entre les sexes ou entre adultes et enfants sont très significatives de l'image que se font les enfants des vertus ou des vices qu'ils ont illustré par leurs exemples.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 283
[La] préférence auto-sexuelle que nous avons parfois gratifiée d'autophilique est loin de répondre toujours à un désir d'apologie, car elle attribue souvent au sexe propre la responsabilité d'actions condamnables ; elle est aussi accusatrice qu'élogieuse. Ce qu'il faut en retenir, ce n'est donc pas à proprement parler une présomption favorable en faveur de son propre sexe, mais une conscience du sexe propre qui pèse d'un poids permanent sur les évocations des individus.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 283
Mais, il y a aussi des différences entre filles et garçons et elles se manifestent non seulement à la puberté, comme nous l'avons vu, mais aussi, et surtout à la deuxième période, soit de 7 à 12 ans.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 283
Dans la première période, entre 3 et 7 ans, il y a une sorte de symétrie entre garçons et filles; l'autophilie sexuelle, déjà très nette, n'était guère influencée que par la nature des actes envisagés.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 283
De 7 à 12 ans, la différence entre garçons et filles prend quelque chose de systématique.
Les garçons ne paraissent plus tenir aucun compte des filles. Elles [p. 284 >] disparaissent et dans la nomenclature des victimes et dans celle des responsables. Sans la place, d'ailleurs, très réduite, que les garçons donnent aux femmes, en particulier parmi les victimes, leur monde semblerait devenir exclusivement masculin. Sans doute, est-ce là le signe qu'ils s'orientent davantage vers une activité débrouillarde, conquérante et parfois violente où les filles n'ont guère de rôle à jouer.
Durant la même période les filles répondent au dédain des garçons par beaucoup plus de considération pour eux. Elles leurs attribuent, beaucoup moins d'ailleurs qu'elles-mêmes, des responsabilités qui ne sont pas toujours louables, mais elles leur font place aussi parmi les victimes. Les filles de 7 à 12 ans s'orientent davantage vers les garçons. Est-ce parce qu'elles les suivent dans leur orientation, entraînées qu'elles seraient par les mêmes tendances pragmatiques. Est-ce un attrait plus sentimental ?- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 284
À l'âge suivant [de 12 à 15 ans] au contraire, l'importance des garçons diminuent sensiblement pour elles, celles des adultes augmente, mais avec beaucoup de réserve encore s'il s'agit des adultes masculins. Le monde des jeune filles redevient plus féminin.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 284
La méchanceté et la bonté s'opposent comme le bien et le mal. Elles n'ont pas de sexe, c'est-à-dire qu'elles offrent, par excellence, le terrain où peut s'exprimer, sans subir d'autre influence, l'autophile sexuelle.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 284
Pour la bravoure, au contraire, la balance penche assez nettement du côté des hommes. C'est pour les filles elles-mêmes, une vertu masculine qui développe ses effets dans le monde des hommes.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 284
Avec la malhonnêteté et l'action honteuse, les distinctions sont plus subtiles. Bien que nombres des actes cités pour les illustrer leur soient communs, il apparaît avec netteté que la malhonnêteté regarde davantage les hommes et l'action honteuse les femmes. Serait-ce que la matérialité des faits ne soit pas seule à compter, mais que dans les jugements mêmes des enfants l'attitude où ils mettent les personnes ait aussi une grande importance ? Dès lors tout s'expliquerait.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 284
L'action honteuse est essentiellement celle dont on rougit ou doit rougir, celle où la dégradation de la personne [p.285 >] passe au premier plan, celle qui est en rapport avec la nécessité de conserver intacte son intégrité morale et n'est-ce pas en effet là ce qui constitue la principale défense de la femme.
Sur la malhonnêteté, au contraire, pèse une disqualification morale mais qui garde quelque chose de plus objectif, dont les conséquences sont plus strictement sociales. La malhonnêteté est affaire de relations entre individus. C'est sur ces relations que porte l'accent, beaucoup plus que les déchéance pouvant en résulter dans la conscience même de l'individu.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 285
L'homme, beaucoup plus que la femme, est un instrument de transactions bonnes ou mauvaises, méritoires ou coupables, mais dont le caractère techniques ou social tend à l'emporter sur le caractère subjectif et moral. Les enfants seraient sensibles à cette différence en identifiant davantage l'action honteuse avec le monde féminin et la malhonnêteté avec le monde masculin.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 285
Au reste, que nos interprétations soient acceptées ou non, les différences sur lesquelles elles reposent résultent bien de nos analyses et ce sont ces différences suivant l'âge, suivant le sexe et suivant les notions auxquelles l'enfant est invité à réagir que nous nous étions proposé de mettre en évidence. Car mieux différencier c'est mieux connaître.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 285
mieux différencier c'est mieux connaître.
- Les notions morales chez l'enfant (1949), Germaine Wallon, éd. L'Harmattan, 2015, p. 285