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Joseph Peyré

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Joseph Peyré
Joseph Peyré, 1935

Joseph Peyré est un écrivain français, né le 13 mars 1892 à Aydie (Pyrénées-Atlantiques), mort le 26 décembre 1968 à Cannes (Alpes-Maritimes).

L'Escadron blanc, 1931[modifier]

C'était, comme tous les méharistes de la compagnie, un homme des Chaamba, mince et sec, au teint jaune, portant le collier de barbe frisée et courte de sa tribu. On l'avait surnommé l'Arzaf à cause de ses yeux bleus décolorés que le soleil semblait avoir éteints.


Enfin, le cavalier fut là, prit le pli, serra la main de son chef et monta en voltige sur son méhari déjà lancé. Comme doit le faire un courrier en mission, il se mit au galop. Une seconde, son burnous blanc flotta dans la nuit, et les jambes de sa monture fouettèrent le sable mat, aussitôt fauchées par l'ombre.


Les hommes, chargés de gandouras kaki, d'étoffes noires ou blanches, de chèches à carreaux blancs et jaunes, de bouilloires, de cordes, de couteaux, de bidons de beurre touareg, de plateaux de cuivre qui luisaient sur eux comme des soleils, remuaient une odeur chaude de poivre, de cannelle, de thé et de tabac, de suint et de cuirs verts.
Mouvement de tribu près de lever le camp, bruits d'armes, rumeurs, appels, invectives, désordre qui plaisait au cœur sauvage de Marçay. Dans ce désordre où tout aurait désespéré un régulier, cet armement de douar barbare, n'avait-il pas retrouvé un à un ses compagnons de guerre ?


Au matin, l'escadron s'ébranla de bonne heure, et, après avoir de nouveau traversé la zone des palmiers agonisants abandonnés aux sables, franchit la dernière ligne de puits…
Les deux hommes de l'arrière jetèrent un coup d'œil au mausolée du marabout qui détachait sur les remparts ruinés sa stèle blanche.
– Qu'Abd-el-Kader Djillali veille sur nous ! dit l'un d'eux.
Le lieutenant Kermeur entendit la prière et comprit la gravité de l'adieu : la dernière amarre était rompue. L'escadron allait se perdre dans l'espace.


Le buste redressé sur sa selle, l'Azraf respira plus fort lui aussi. Et avec lui les quatre-vingts Chaamba échappés à l'étouffement des palmeraies. Désormais le vent sec gercerait leurs lèvres crevées, patinerait comme des cuirs leurs faces jaunes, donneraient à leurs mains fibreuses la rêche dureté des cordes. Plus une goutte d'eau en suspension dans le ciel de fer.


– Nous ne l'attendrons qu'un quart d'heure, dit Marçay.
Le camp aurait dû être depuis longtemps levé : le soleil rasant allumait les cuivres, l'acier des mousquetons, des mitrailleuses. Cheikh ben Kouider, furtivement, écarta le pan de sa gandoura délavée et cracha sur sa poitrine.
Mais le Fenneck surprit son geste.
L'homme qui a peur, pour conjurer le mal, fait le geste de cracher sur sa chair nue. Cheikh ben Kouider venait de se trahir.
Les minutes passèrent.


Mais Kermeur essaya en vain d'en savoir davantage. Qu'était-ce au juste que ce reg mystérieux qui semblait marquer le seuil de la mort ? Pourquoi le danger commençait-il là ? Il aurait voulu presser Marçay de questions, le retenir, l'amener à un entretien plus étroit. Car l'amitié qui le fuyait lui devenait indispensable comme l'eau à un malade de la soif.


Le Fenneck l'avait-il senti ? Pour la première fois, il avait creusé tout contre celui de son chef son trou de sable.
– Negoussi est rentré… Encore aucun homme malade… lui dit Kermeur, tremblant de fièvre, vers deux heures.
– Encore aucun… répéta le Fenneck, comme s'il eût hésité.
Un tourbillon de sable grésilla, rapide, sur les cuirs.
– Jusqu'ici, ce n'était rien, reprit le Fenneck. Nous faisions un parcours de caravane. Maintenant, il n'y aura plus que les forts pour tenir…
Il étouffa sa voix sous son burnous. Une ombre venait de passer.
– Le lieutenant qui vient de faire une autre ronde…
Et avant l'aube, il sera debout avec les guides !


La certitude du nomade prêta à Kermeur une force qui le tint debout contre la fièvre et le vertige revenus. Mais cette force factice durerait-elle jusqu'au matin de la bataille, lui donnerait-elle la joie de se porter au secours de Marçay, de combattre à côté de lui ?


Depuis vingt-quatre heures, il était interdit de boire en dehors des heures fixées. Pour ne pas dessécher davantage leur bouche, les hommes ne fumaient plus, ne parlaient plus. Des heures, ils avaient fait route, cachés sous les plis retombants des burnous, hagards.


Marçay fit un effort pour penser à la bataille. La situation était aussi claire qu'au soleil. Sur le cif de la grande dune, à sept kilomètres environ, les éclaireurs du rezzou. Sur les puits de Tadjenout, sur les oglat, le camps des pillards, avec ses sentinelles doubles, son carré d'abris hérissés de carabines à tir rapide.
Sept autres de leurs méhara forcés, les Berabers n'avaient pas pu aller plus loin. Mais savaient-ils qu'ils auraient à combattre contre des hommes traqués par la soif ? Contre des hommes, qui, même après la mort de tous leurs chefs, ne fuiraient pas, qu'il faudrait, s'ils étaient vaincus, finir de tuer l'un après l'autre, et qui feraient leurs derniers pas vers les trous d'eau ?


C'était la fin du Sahara, des deux côtés. Les Touaregs d'autrefois avaient oublié les chemins du Hank, faute de guides. Dans ce combat, les Berabers venaient de perdre l'un de leurs deux ou trois derniers guides. Bientôt ils oublieraient la route du Sud, eux aussi, faute d'hommes pour les conduire.


Pour Kermeur, mieux valait qu'il ne vît pas cette victoire. Son espoir de soldat aurait été déçu. Il ne savait pas l'exigence du désert, sa route aride, sa misère et l'âpre mesure de ses joies.
Des hommes exténués.
- Sihira bouch
La Croix du Sud montait à l'horizon.


Le Chef à l'étoile d'argent, 1933[modifier]

Un voyageur mal habitué à l’éblouissante lumière du désert n’aurait pas distingué, dans la vapeur dorée du couchant des sables, les trois cavaliers qui, par ce soir d’avril 1915, avançaient vers la falaise de Tinghert. Mais le dissident qui, jeté sur leur piste par la poursuite d’un troupeau d’antilopes, les suivait à la trace depuis quarante heures, les reconnut dès que l’ondulation de la dune mourante les démasqua à ses regards.

  • Incipit
  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 11


La guerre était-elle vraiment sur l’horizon ? Au désert, et sur ses centaines de lieues, les événements se préparent avec une patience, les ciels se chargent avec une lenteur infinie. Un rezzou se rassemble-t-il dans une zone inquiète ? Pendant des semaines, les hommes qui le formeront font route vers le lieu de rassemblement. On cite leurs noms, leurs passages, leurs hésitations, leurs détours.

  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 53


Et, dans le mouvement qu’elle fit, son haïk s’écarta et découvrit son visage.
Le jeune chef en reçut un éblouissement. Dans l’obscurité de la tente d’In-Immenas, il n’avait vu de la jeune fille que des yeux dilatés par l’agonie, puis ranimés et, de nouveau, habités par la vie. Or, le visage qui venait de lui apparaître ressemblait à une image qui lui était familière, celle de Fabiola de Henner qui regarde de face, les yeux un peu baissés. Mais déjà, avec une coquetterie de femme, l’enfant refermait les plis de son haïk.
Puis elle partit, du geste furtif du nomade un instant prisonnier des murs. Et le jeune homme eut l’impression qu’il ne la reverrait plus.

  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 57


– Ton cœur est grand… grand. Je ne t’oublierai jamais, jusqu’à ma mort, car sans toi, je serais déjà sous la terre.

  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 62


– Chante.
Fatoum obéit.
Tandis qu’elle chantait, le Chef à l’étoile d’argent sentait la Gazelle l’enlever du sable, avec ses armes, l’emporter. Il voyait, sur le ciel du Sud voilé par la tempête, l’armure de Driss, et son signe rouge de croisé, qui le conduisait vers la guerre. Et, sous l’odeur de plâtre de gypse arrosé de la pièce obscure, mêlée à celle de jasmin, ses narines ouvertes aspiraient l’odeur des grès du Tassili oxydés par le vent, et la sueur des bêtes fortes.

  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 77


– Ne m’abandonne pas. Si tu me laisses, je vais mourir.
La voix d’imploration, qui paraissait sortir du cœur du vent, des profondeurs gardées par la nuit, était-ce la voix du blessé, la voix de Fatoum, hantés l’un à l’autre par la vision de l’abandon ? Le chef n’arrivait plus à les distinguer, et la monotonie de la marche lui inspirait un sentiment de solitude et de faiblesse dont il n’avait jamais connu le goût amer.

  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 97


– Ecoute, dit le radio à Le Brazidec. Tu n’entends pas la voix des dunes ? Quand on l’a entendue une fois, on n’espère plus. Que peut espérer l’homme perdu dans ce murmure ?

  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 204


Sur le glacis, sous les ordres du lieutenant, les spahis attendirent alors l’assaut, prêts à se barricader s’il le fallait dans le four blanc du bordj, et à en défendre les portes jusqu’au désespoir. Pour la première fois depuis les lointaines journées de Djanet, l’ennemi vainement cherché dans les canyons du Tassili, sous l’enceinte muette du R’at, invisible et partout présent dans les défilés de la retraite, apparaissait en pleine lumière, sur la nudité jaune du sable : corps vivants qui se découvraient, bondissaient avec des cris, puis roulaient sous les coups de feu.

  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 209


Pour aller plus vite, les conducteurs tranchaient les cordes au couteau, crevaient les ballots qui laissaient rouler les oranges dorées, les pommes de terre aux pousses vertes, les citrons dont la seule vue mouille la bouche et rafraîchit les muqueuses excoriées, les melons éclatés comme des grenades, les oignons à la senteur sucrée, avec une odeur chaude de bateau de primeurs, qui ouvre ses cales au soleil.

  • Le Chef à l'étoile d'argent (1933), Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 231


Les scorbutiques, qui s'étaient traînés auprès des bêtes baraqués, haletantes, ramassaient les oranges juteuses, les prenaient à deux mains, les suçaient avec une jouissance douloureuse. Il fallut établir un cordon de garde. Mais désormais le midi de décembre avait pour tous sa douceur odorante de jardins, sa tiédeur pareille à nos automnes d'Europe.
Le drapeau décoloré par le soleil flottait toujours sur les terrasses, avec un vol bleu de ramiers. Décembre 2016. Les ruines reconquises de Douaumont et de Vaux étaient alors ensevelies sous la neige du plus rude hiver de la guerre.


Pourquoi avait-il lui aussi voulu mourir dans cette boue, sous cette brume irrespirable, où le cœur et le passé d'un chef ne comptait plus ? Pourquoi depuis Tabelbalet, n'avait-il eu qu'une idée, celle de servir à son tour sur ce front de France qui, au risque de perdre le Sahara, l'avait privé d'un Laperrine, et qui, l'un après l'autre, avait tué tant de Sahariens formés à l'école du grand Chef ? Sur le remblai de glaise, dans les boyaux, un sergent en valait un autre. Et, son sergent tombé, un zouave se levait du fossé.

  • Le Chef à l'étoile d'argent, Joseph Peyré, éd. Grasset, 1954  (ISBN 978-2-246-80853-4), p. 249/250


Devant les yeux du jeune chef, à perte de vue, les fleurs mauves du lobelia fleurissaient la hammada de Tinghert. Il sentait le vent tiède courir sur sa poitrine. Entre les méhara de Salem et de Driss, la Gazelle avançait à longues foulées vers l'Aïn.
– Le sergent de la deuxième ?
– Où est le sergent de la deuxième ? demandaient des voix dans l'obscurité.
La nuit était venue.
La pluie ruisselait. Un falot jaune cherchait les hommes. Avec les autres, le Chef à l'étoile d'argent se leva de la boue.


Sous l'Etendard vert, 1934[modifier]

Le lendemain, le sort était jeté : Khyar entrait dans la guerre. Par quelles promesses la jeune fille l’avait-elle gagné ? Les femmes n’ont jamais laissé un Hoggar insensible.
Khyar sellait joyeusement l’Iklane, en fredonnant une vieille chanson de guerre de son clan :
Filles des tentes,
C’est à cause de toi que je pars vers l’Est.
Il y trouvait un sens nouveau, qui ne s’adressait qu’à lui. Car la fatigue du plaisir courait encore ses os.


Imitant les mouvements du garde, Khyar fit jouer la baïonnette dépliante, avec la religieuse admiration du Hoggar pour les armes. Au désert, un fusil fait le cœur d’un homme. Il peut être payé le prix d’une vie.


Vous êtes plus nombreux que les étoiles de la nuit. Vous n'aurez qu'à paraître devant Djanet. Les deux Français sont seuls comme deux lépreux. Je les ai vus sur la terrasse du Fort, hier matin. Le brigadier a du rentrer. Avec ses yeux perdus, il ne pouvait même plus supporter la lumière. Vous les prendrez sans perdre un homme.


Le vainqueur ne recevait-il donc plus le prix du sang ? Le Hoggar en exil se sentit victime d'une injustice qu'aucune réparation ne pourrait racheter. Tinirt même, dont il avait pourtant servi sans marchander les volontés, lui manquait au moment où il aurait dû avoir, au moins d'elle, sa récompense. Elle était bien du sang des marchands, des sédentaires avilis. Alors, pour la première fois Khyar regretta de s'être séparé de son peuple, et d'avoir cherché un autre destin. Celui qui a la malheur de s'éloigner de ses tentes languit comme le rameau coupé du figuier et finit par tomber en poussière.


Comment diriger sa marche épuisée ? Où l'Azdjer pillard et ses hommes avaient-ils pu fuir ? Les pâturages étaient abandonnés au feu du ciel. Pas un berger n'apparaissait au bord des oueds. Chaque soir, le Hoggar perdu s'arrêtait et creusait pour la nuit son trou de sable, comme une bête se terre. Bientôt il désespéra de retrouver, sur cette terre où il lui semblait tourner ses pas, l'Iklane qui était la moitié de son corps, celle qui endure les routes infinies. Le nomade vit à la grâce du miracle. Or les eaux se tarissaient. Chaque soir une fatigue grandissante couchait Khyar dans sa fosse, toute pareille aux tombeaux qui boursoufflent ce sol funéraire, et le fantôme de la soif commença à hanter ses nuits.


Khyar se tut. Les morts se succédaient. Il imaginait le corps doux de Tinirt déchiré par le couteau, souillé de sang noir comme celui de Ben Ahmed sous la clarté de la lune. Et les nuits du jardin d'été d'Adjahil lui apparaissaient aussi mortes que sa jeunesse.


Le père ne pouvait pas entendre l'escadron des Hoggars qui entonnait son chant de route, voir le peuple qu'il avait rêvé de convertir à la vie familiale et rustique, obéir à l'appel de l'esprit guerrier, et renouveler les chevauchées des cavaliers numides, comme si les siècles n'avaient point passé. Le désert n'était-il pas le même, vierge et cravaché par le vent barbare ?


Jamais l'Ourane n'avait manifesté sa haine pour le marabout. Ainsi les signes qui se multipliaient, présageant les malheurs qui allaient frapper pêle-mêle les éléments disparates et les esprits ennemis de l'Armée, faisaient éclater au jour les hostilités secrètes, les rivalités passionnées qui divisaient ce corps difforme, replâtré par l'apparente unité d'un Djehad sur le sens duquel les hommes n'étaient pas d'accord, et qui allait du pillage à l'acheminement mystique.


- Et toi, Khyar, pourquoi es-tu parti ? Pourquoi ?… Il faudra que tu me l'expliques… Tu n'expédies pas tes chameaux, toi, chaque nuit, avec tes charges de butin. Et tu sais que tu ne les verras jamais, le Soudan, les méhara, les femmes qu'on t'avait promises. Alors ?


S'il n'avait pas plu, le vent aurait eu vite fait de sécher la sueur de fièvre qui se mêlait à la chaleur épanchée de la plaie, la sueur de sang. De sa main gauche, déjà paralysée à demi, le blessé défit la guinée déchirée de son vêtement, afin d'exposer sa chair au souffle de vie. Mais seul, il le savait, le vent natal aurait pu faire le miracle. Le vent des vallées radieuses de sa montagne, des forêts de tamarix, des prairies violettes de krom, des aguilles roses de l'Atakor, de son pays qui ne connaissait pas cette pluie grise, cet étouffement, ces pleurs, et où les bruits du soir étaient des bruits de joie : le coup de feu du chasseur de mouflons, le chant du chamelier, les cloches des troupeaux.


Sang et Lumières, 1935[modifier]

Comme nous attendions, abrités sous les arcades, le passage improbable d’un taxi, je m’aperçus qu’une affiche du « Quite de l’Eternité », l’image d’or de sa gloire, la passe de cape qui l’avait rendu célèbre, lacérée par le vent, pendait à une palissade de planches en face de nous. A peine l’avais-je remarquée que Ricardo porta à son tour les yeux sur elle, et, fermant les revers de son manteau, avec le geste frileux qu’il avait dans ses mauvais moments, il me confia qu’il avait aimé Madrid qu’il avait cru conquérir et garder. Ce fut la seule fois qu’il trahit pareille souffrance :
- Si Madrid était aussi facile à retourner que les hommes du bar Huelva, je n’en serais pas où j’en suis. Mais Madrid est pire que la femme dont on voudrait être le plus aimé. Pire qu’elle. Vous croyez l’avoir un soir, vous défaillez. Et puis, rien. Le vent déchire les affiches.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 47


Personne ne pouvait parler du taureau comme Jean de Dieu, fils de la maremme andalouse, et qui s’avait imiter, par un sifflement mystérieux, perdu dans la distance, la double voix nocturne du vent du fleuve et des troupeaux. Tandis qu’il me montrait ses dessins à la plume, ses aquarelles où le taureau, surgissant d’un pli de la rive du fleuve, régnait avec la majesté de son armure sur un horizon de steppe marine, il me confiait les mœurs des troupeaux, leurs migrations au temps des crues, leurs légendes et leurs terreurs. Puis il me parlait, avec la même intuition, la même poésie, du destin des toreros qu’il pénétrait jusqu’à leurs nerfs cachés, jusqu’au secret dessin de leurs blessures et aux replis de leurs angoisses.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 81


Le cabinet particulier étant des plus étroits, Ricardo avait attiré Pili contre lui. Manuel ne bougeait plus. La comtesse pleurait doucement. Et c’était, dans le nuage de fumée de tabac, l’odeur des alcools renversés, le miracle d’une voix pathétiques qui chantait la solitude, le désert de la marisma du Guadalquivir, du Fleuve nostalgique et triste, charriant comme le Don ses ciels écrasants et ses nuages. Puis la voix défaillait ainsi qu’un jet d’eau, une lance jaillissante et brisée. Était-ce là l’incantation, la drogue que Ricardo cherchait auprès des musiciens gitanes ? Je le voyais peu à peu repris, éloigné par un charme qui m’échappait.
Je me souviens surtout de la solea que sembla gémir pour lui le cantor :

Tu ne m’auras pas aimé,
Et tu me regarderas mourir
Comme le Christ sur son bois de supplice.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 117


Sous l’épaisseur de son manteau, Pili tremblait de froid. Ricardo se dégantait pour examiner un gicleur. Malgré moi, je comparais sa silhouette anémiée, maladive, à celle de Villareño, qui se tenait à l’entrée de l’arène, campé sur sa jument d’entrainement, la casquette andalouse à l’oreille, la pique des gardiens au poing. Jamais je ne devais voir plus différents l’un de l’autre les deux rivaux que le costume de lumières confondrait pour leur duel dans l’enceinte de la Vieille Plaza. Car l’affiche du vingt-cinq mars enfin arrêtée réunissait les noms de Manuel-Villareño-Ricardo, avec justement des taureaux d’Alvaro Sanchez.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 139


Je n’ai jamais revu Main-Brûlée, que j’avais connu dans sa force au bar Huelva, la nuit où Ricardo était allé le défier devant les chômeurs. Mais le visage qu’il avait sous la lampe sans abat-jour de la permanence de police, ce visage miné par la phtisie et par l’angoisse, son expression émerveillée, incrédule, si humble, lorsqu’il fut gracié par Ricardo, son tremblement, ses poignets sanglants, je ne les ai pas oubliés.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 158


Je m’étais avancé de quelques pas. Pour avoir un sentiment juste de la Vieille Plaza, temple de sang lavé, que le ciel cristallin, foncé, ciel de soleil d’hiver par vent de sierra n’arrivait pas à éclairer, il n’était sans doute pas de meilleur état de grâce que de venir comme je le faisais de la maison des blessés. Je me trouvais pour la première fois au pied du cirque isolé sur son parvis avec son chevet de cathédrale et ses meurtrières mauresques qui semblent ouvrir sur un abîme. Je ne sais d’où vient pareille sensation. Il m’a toujours semblé que ces arènes s’élèvent à la cime d’une montagne, ou au bord d’une mer creusée en précipice. Peut-être est-ce la présence de la mort. L’usure de la brique, délitée par le vent, le soleil cru, le gel, ruinée par le frottement à hauteur de cheval des étriers, des mors des bêtes rouées de coups, laisse une impression de blessure, le poids d’un passé de peine et de fatigue qui me fut sensible dès ce jour-là.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 164


– Lorsque vous regardiez le sable, c’était à moi que vous pensiez, à moi seul… Aussi, je sens que je vais vous aimer comme je ne l’aurais jamais cru, plus que je n’aime jean, plus que je n’ai jamais aimé personne. Je regrette de ne pas pouvoir vous emmener à Séville. Jusqu’au dernier jour, je ne voudrais plus vous quitter.
Il s’était arrêté, pour me laisser, au coin de la rue Velasquez, où Noguera et Marinela l’attendaient. De son geste anxieux, il frappait le plat du volant, doucement. Sa voix basse me touche encore. Je revois ses yeux gris, ses yeux tendres de jeune fille.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 167


Ce qui me serrait le cœur, c’était le drame de l’homme, ce jour-là celui du Niño, demain celui de Ricardo, prélude et déclin d’une vie de champion dans l’arène. Et, pour la première fois depuis que j’en connaissais le danger, le pouvoir meurtrier, par tant de tragédies, de blessures touchées du doigt, j’aillais voir paraître le taureau.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 179


- J’ai compris maintenant.
Marinela, qui me guettait comme un chat, me demanda :
- Qu’est-ce que vous avez compris ?
- Rien de compliqué.
J’aurais voulu lui dire que tout était simple, qu’elle n’était qu’une fille, une chose à plaisir. Une bête à tuer, si on avait voulu en rompre le pouvoir funeste.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 227


Plus on est proche de l’arène, plus on entend les bruits, les voix du drame, plus on ressent le choc violent. J’allais me trouver à quelques pas à peine de Ricardo, comme si j’avais été dans son coin avec ses seconds. Je pourrai suivre le jeu de son visage, de son corps dont je connaissais désormais toutes les faiblesses, épouser le mouvement de son sang, de ses nerfs.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 274


Une à une, nous franchîmes les portes condamnées qui coupent le tunnel de l’infirmerie à l’arène, les portes successives, verrouillées et gardées comme autant de grilles de prison ou de fosse aux lions, qui font le mystère bestial du cirque. Mais lorsque je débouchai dans le canal du couloir dominé par la falaise des spectateurs accoudés sur nous à la barrera et, de là, montant jusqu’en haut du ciel, aussi haut que les mâtures des plus grands voiliers dans le vent, assourdi par la rumeur de l’immense cratère penché, je fus pris d’une espèce de vertige, et je baissai les yeux, comme le torero qui entrant dans l’arène, cherche le contact rassurant du sol, et pour qui n’existent pas tout de suite les tumultueuses, les oppressantes murailles vivantes du puits.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 275


Il avait la sueur de l’angoisse. Il prit des mains trop baguées du valet d’épée la cape de travail rose et jaune. Et, sous les insultes qui continuaient à pleuvoir, il s’adossa à la palissade, face à l’arène, la montera sur les sourcils. L’heure où, selon la formule tragique, « le tueur s’enferme avec le taureau », l’heure qui le menaçait depuis des semaines et des mois était venue.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 278


Les acclamations unanimes, étouffantes, qui accueillirent l’écroulement du taureau gris-fer foudroyé par Villareño, et qui escortèrent le tour du cabotin sous les outres, les mouchoirs, les hurlements d’ivrognes et les cigares, préparèrent, durant de longues secondes, creusèrent le grand, le mortel remous où Ricardo coulait, avec la lourdeur de plomb des noyés.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 284, 285


Ce mouvement, ce geste d’impuissant près d’être désarmé, et obligé de laisser le taureau saignant fuir sur ses pattes lourdes, d’un trot de bœuf, vers l’endroit où il croyait aveuglément trouver le refuge, ce quite qui envoyait au vide, à la grâce des capes des peones, la bête libre et apeurée, quelle parodie du Quite de l’Eternité, de l’image souveraine, inoubliable, que l’affiche n’avait pas besoin de rappeler au souvenir de Madrid ! Quelle ombre dérisoire du mouvement de cape dont la lenteur inouïe, presque au même endroit, au même point du sable rouge, avait paru fixer plusieurs minutes dans l’air dense les plis ouverts de la cape rigide, la charge du taureau possédé, enveloppé par le charme insensé du leurre, conduit dans un voyage éternel comme ceux que fixe à jamais l’élan de la pierre ou du bronze, et dont la durée, le rythme étouffant avaient suspendu le cœur de treize mille spectateurs fondus en un seul corps par son miracle !

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 288


Comme les treize mille spectateurs de l’arène, je garde dans les yeux l’image orgueilleuse des véroniques, les quatre passes de cape liées dont il nous fit la grâce. Dans ce mouvement, la magnificence de son masque brûlé, du vêtement vert-jade et blanc, l’arrogance de ses jambes longuement fendues, de ses reins de danseur, l’élan de son buste sanglé furent une chose à ne plus oublier. Jamais je n’avais entendu, avant le moment où il prit le taureau dans sa cape, et où il parut l’enlever vers le ciel dans les plis rose et or ralentis, suspendus, à sa gauche, à sa droite, la masse noire, obscure et chaude de la bête frôlant à chaque élan la passementerie de sa poitrine, jamais je n’avais écouté le « Ole ! », la clameur rythmée, étouffée, ressenti le spasme d’émotion dont on parle toujours, que l’on voit une fois mettre debout, peu à peu, saisir au ventre une foule possédée, le spasme de quelques secondes qui laisse du plaisir pour une vie. Ramenant le poing droit sur la hanche, le gitane finit par la demi-véronique, qui fixe et cloue le fauve étourdi, immobile et béant, vaincu sans une goutte de sang. Et il s’en alla, dans le magnifique geste d’orgueil du torero qui vient d’achever sa plus artistique victoire.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 300


Pourtant, après la deuxième pique, au moment où tous les yeux suivaient la forme bleu et or, le quite fut pour Ricardo. Et je crus que le ciel fondait, dans une inoubliable nappe de soleil. La cape unique, la cape de Ricardo, les ailes étendues au ras du sol, venait de s’ouvrir pour le quite à la véronique, emmenant le taureau avec une négligence, un abandon mortel. Ce ne fut qu’un éclair, la fulguration de quelques secondes, mais sur un champ si sombre qu’elle prenait un éclat de miracle.

  • Sang et Lumières (1935), Joseph Peyré, éd. Grasset, coll. « Les Cahiers Rouges », 1989  (ISBN 978-2-246-15572-0), p. 303


Croix du sud, 1942[modifier]

Qu'on ne se trompe pas sur un Brécourt. S'il est apparu comme un insensé, un homme qui ne voyait pas, et si sa vocation, dans l'autre temps, a fait sourire, c'est que nul ne l'avait compris, sauf celle qui lui est resté vouée.
En vérité, Brécourt, Saharien, a aimé le Sahara comme sa vie. Il n'avait pas besoin qu'on lui ouvrît les yeux. Une lucidité amère l'éclairait, bien avant l'avertissement des hommes. Il n'a ignoré du Sud, ni réalités, ni misères. Mais il avait choisi, décidé de vivre sous sa Croix.
Il a préféré à tout autre pays cette terre de solitude, où il devait, à travers les déceptions, trouver le tête-à-tête avec lui-même, la liberté et la grandeur pour lesquelles il était fait.


Pourquoi l'histoire d'Attalah ben Cheick, qui allait à l'aube reprendre le désert, emmenant son fils coupable, possédait-elle à ce point l'esprit de Brécourt ? Était-ce, avec la clarté blanche qui glaçait les cimetières mozabites, l'effet de l'approche de l'heure où le nomade sellerait ses montures, l'appel de l'étoile qui le conduirait ? Était-ce la faute de la lettre de Chavannes, et de sa plainte de dépossédé ? Brécourt parlait du cœur d'un Attalah, des anciennes fiertés.


Lui aussi, Brécourt, allait donc partir, comme Attalah. Saharien français ou indigène, le mal était au fond le même : la déchéance du nomade. La rumeur de la vie impie venait à peine de céder à la pureté de la nuit. Les quinquets à l'acétylène étaient morts aux terrasses du quartier réservé, avec les rires des filles, et les disques des phonographes. Une Ouargla perdait plus que les cœurs, elle abîmait un monde. En emmenant son fils, Attalah, dans l'esprit de Brécourt, allait plus loin qu'il ne pouvait le concevoir. Il retrouvait la voie, et montrait le chemin aux derniers fidèles.


— C'est ta femme ? lui demande Attalah. Emerveillement pour une vie, Anne-Marie entendit Brécourt dire oui.


Était-ce vrai que vient un jour où l'homme avance en âge et, malgré tout son amour, renonce ?


Le jeune officier se baissa, afin de rattraper les papiers. Mais le commandant l'arrêta de la main. Un Brécourt n'était pas fait pour se plier. Et, à pareil moment, entre eux, les états et les circulaires pouvaient bien filer au vent du diable.
— Laissez-les.


Un Brécourt, au contraire, était porté en sens inverse par son entêtement, sa précoce misanthropie, et par un amour qui, ne fût-il resté aucune solitude pour lui répondre et le justifier, l'eût poussé à des extrêmes insensés pour tâcher de faire la preuve que la foi a toujours le dernier mot contre le doute.


Une fois de plus, le Tassili avait ouvert au voyageur ses solitudes. Qui avait dit que le Sahara était fini ? Il ne l'était pas plus que le soir du combat de l'Escadron Blanc, lorsque Marçay laissait tomber son mousqueton. Le désert ne mesure pas aux combats son éternité. Il suffit de la marche de trois nomades faisant dégringoler les pierres, et réveillant dans les rochers des tentes invisibles.


Le pays de Brécourt, le pays de la Croix du Sud, commençait au-delà des cimetières d'El Mihan, à la montagne cernée par un ciel dur, sur lequel, succédant aux étoiles évanouies, le soleil rouge des jours cruels allait bondir. Là cesseraient les bruits de la présence humaine, le chant des coqs, le grincement des puits, même le froissement de palmes dans le vent, pour laisser régner le silence des pierres. Son église attendait, celle qu'avaient élue avant lui, pour des raisons demeurées leur secret, les héros de son culte, la plus vaste, la plus large et nue qui s'ouvre à la prière de l'homme. Ses compagnons enfin s'assemblaient pour le suivre, fidèles naturels, grands nomades sauvés.


Mais Brécourt pensait à présent que la valeur militaire ne se mesure pas à la grâce du combat. Les âmes des anciens qui l'avaient appelé et mené jusque-là, il ne demandait plus à relever leurs traces, à les accompagner dans la gloire du feu. C'était sans doute pourquoi, et sans s'en rendre compte encore, il avait pu lutter contre les argumentaires du désespoir, résister, continuer à croire. Dès son premier séjour au désert, il avait en effet entrevu la vérité de la vie saharienne dans l'effort, la responsabilité d'un chef seul. L'exil avait mûri dans le même sens ses pensées, tandis que le regret, un amour déjà confirmé, le rappelaient aux lieux de ses premières solitudes. Il lui restait encore, lorsqu'il était reparti de Djanet, et arrivé au Bordj, à s'assurer par une épreuve quotidienne de la possession de sa nouvelle vérité, et à connaître la grandeur du soldat sans armes.


Que ceux qui auront cru que le destin d'un Brécourt allait, au dernier jour, s'accomplir, sachent que ce temps de sa solitude fut au contraire l'achèvement, la perfection de sa vie. Ils doivent le savoir, afin qu'une vocation saharienne soit, encore aujourd'hui, justifiée. Un Brécourt était né pour l'exaltation du désert. Le désert accueille toujours l'âme consumée par le désir, lui accorde son épreuve. Il n'y faut ni la grâce d'une circonstance héroïque, ni même celle de l'oraison.


Plus qu'aucune autre œuvre coloniale peut-être, celles des Sahariens sans nom, centurions obscurs, celle d'un Brécourt dans son Bordj prêtait à pareil retour sur le sens du drapeau, et du service du soldat.


L'Étang Réal, 1949[modifier]

« Vous êtes sans doute le médecin de la comtesse d'Aimargues. Où croyez-vous donc qu'elle veuille en venir, vous qui la voyez ? » me demandait-on à Marseille ou à Arles, lorsqu'il m'arrivait encore, de loin en loin, de quitter mon désert pour les besoins de ma profession.
  • L'Étang Réal, Joseph Peyré, éd. Fayard, 1949, p. 17


Pour appeler encore comtesse d'Aimargues la maîtresse de la Martelière et des bords de l'Etang Réal, il fallait bien être un étranger de Marseille ou d'Arles, ou le curé des Saintes, ou le notaire, ou quelque manadier bourgeois ou hobereau de l'autre bord du Vaccarès.
  • L'Étang Réal, Joseph Peyré, éd. Fayard, 1949, p. 17


Avant de devenir maîtresse de la Martelière, et de son domaine mi-ruiné, la comtesse d'Aimargues, de Mornès, et autres lieux-dits de Camargue, avait mené deux vies
  • L'Étang Réal, Joseph Peyré, éd. Fayard, 1949, p. 35


Pour la gagner aux rites de la nouvelle tradition, il avait fallu ses fiançailles avec le déjà mûr comte d'Aimargues, mainteneur de la Nation Gardiane, et son passage après la messe de leurs noces sous la voûte de tridents des trois cents gardians à cheval rameutés pour leurs épousailles.
  • L'Étang Réal, Joseph Peyré, éd. Fayard, 1949, p. 36


[...] Le Bison, encore vivant au temps de ce récit, et retiré sur les bords de l'Etang Réal, avait porté très haut le nom de la manade d'Aimargues, et sa devise blanc et noir.
  • L'Étang Réal, Joseph Peyré, éd. Fayard, 1949, p. 36


Les préférences de la châtelaine d'Aimargues allaient encore aux jeux équestres, aux ferrades, et aux grandes battues au sanglier.
  • L'Étang Réal, Joseph Peyré, éd. Fayard, 1949, p. 36


Elle avait renoncé à la vie mondaine, et quitté le château d'Aimargues pour se retirer sur les bords de l'Etang Réal, la part la plus ingrate de ses terres.
  • L'Étang Réal, Joseph Peyré, éd. Fayard, 1949, p. 37


La Tour Noire était une ancienne terre des Aimargues, et la Dame avait connu l'héritière tout enfant.
  • L'Étang Réal, Joseph Peyré, éd. Fayard, 1949, p. 189


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